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Assainir à mort

Assainir à mort

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Quoi qu’en disent, ces jongleurs de mots qui dirigent l’Europe: ils n’essaient pas vraiment de construire une société plus solidaire, plus sociale, plus juste. C’est qu’ils considèrent qu’il n’y a rien à faire contre le pouvoir des marchés financiers qui peuvent briser n’importe quel Etat occidental, à l’exception des USA.

De cette soumission aux «lois» du capital plus concentré et plus mobile que jamais résultent les politiques dites d’assainissement budgétaire. Elles sont invariablement conduites à coups de coupes dans les dépenses publiques affectées aux systèmes d’assurance sociale et vont généralement de pair avec le report d’investissements dans les infrastructures, la hausse directe ou indirecte des impôts et taxes, le démantèlement de la protection du salarié et des «économies» dans des secteurs sans défense, comme, par exemple, la culture.

Oui, elle souffre, la culture. En Italie, il n’y a plus d’argent pour restaurer des monuments comme le Colisée ou la place Saint-Marc: des promoteurs privés peuvent se poser en sauveurs en dépensant une infime partie des millions que le fisc n’exige pas sur les bénéfices. La malheureuse Grèce est contrainte de vendre des îles et des plages, en attendant de brader le Parthénon.

La liste des forfaits contre la culture perpétrée par les Etats européens depuis le crash du capitalisme de casino en 2009 est longue. Il serait intéressant de l’établir scrupuleusement et puis de calculer la somme des «économies» faites en privant les musées, les théâtres, les festivals et surtout les auteurs et les artistes d’une partie vitale des ressources indispensables.

Pour satisfaire les fameux «marchés» et les agences de rating qui les terrorisent, les gouvernements s’échinent à réduire les dépenses publiques coûte que coûte. Le nôtre, malheureusement, ne fait pas exception, alors qu’il dispose d’une marge de manoeuvre bien confortable. Sa démarche générale est simpliste et dangereuse: que l’on essaie donc de réduire tous les budgets (hors personnel pour le moment) de dix pour cent!

Il est évident que telle ou telle administration gaspille de l’argent. Mais il est tout aussi évident que certains secteurs et activités, parce ce qu’insuffisamment servis, devraient pouvoir obtenir davantage de moyens maintenant, en pleine «crise». Le lecteur aura compris que je citerai la culture en premier lieu, la petite, la grande, la traditionnelle, l’expérimentale.

Madame la Ministre, il faut, par exemple, empêcher la disparition rapide de nombre de corps de musique dans nos villes et villages, de chorales, de scènes; il faut les soutenir davantage que les sponsors privés, malades eux aussi de la fureur d’économiser, supprimant les contrats et les dons quand ils le peuvent. Comment voulez-vous, et c’est un cas réel, un cas d’actualité, qu’un choeur de chant classique ose se lancer, avec ses bénévoles, dans l’aventure du financement de son grand concert annuel s’il ne peut plus compter sur un subside public digne de ce nom? Et j’adresse la même question aux collèges échevinaux dans grandes communes.

Il est encore temps d’éviter la casse et de relancer l’envie d’exceller. Saisissez votre chance de devenir une ministre méritant respect, Madame!

Alvin Sold