En arroseurs arrosés, et sur une défensive qui n’a d’égal que leur superbe d’avant. Eux qui avaient réussi à imprimer sur l’Union européenne leur sceau d’une politique de casse sociale et de libéralisme à outrance.
" class="infobox_img" />Danièle Fonck dfonck@tageblatt.lu
Il aura suffi que les électeurs français renvoient leur président sortant se rhabiller, pour que, oubliant tous leurs mensonges et toute leur arrogance d’avant, les dirigeants de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne, de l’Italie ou de l’Espagne, pour ne citer qu’eux, révisent à la hâte leur credo voulant que seule l’alternative de la rigueur ait droit au chapitre.
Soudain, comme si l’on avait accordé autrement leurs cordes vocales, ils commencent à mettre un peu de vin dans leurs règles d’or et à admettre qu’une pincée de relance économique ne ferait de mal à personne en temps de crise. Eux qui, jusqu’ici ne juraient que par l’austérité, faisant payer aux seuls citoyens les pots cassés de la crise financière, voilà qu’ils redécouvrent comme par miracle que si l’on se borne à saigner les peuples, la crise s’approfondit.
On n’ose imaginer quelle aurait été leur réaction, si d’aventure leur champion de droite avait remporté les élections en France. Avec la même assurance ils continueraient d’enfoncer aujourd’hui le clou de l’austérité, poussant à bout les peuples, attisant la révolte sociale.
Souvenons-nous de l’épisode tragique du référendum grec en novembre 2011. Voilà qu’un premier ministre socialiste, ne sachant où donner de la tête pour contenter les créanciers de son pays, avait osé proposer à son peuple de se prononcer par voie référendaire sur les mesures imposées. Voilà qu’il avait manifesté son désir d’une consultation démocratique au lieu de se plier sans broncher aux diktats de Bruxelles. Cela en avait choqué plus d’un. Y compris notre premier ministre. Par contre, le fait que, quoiqu’élu, Papandréou ait été écarté du pouvoir, et remplacé par un technocrate non élu, n’avait pas ému grand monde.
Que cela puisse discréditer durablement la classe politique de tout le continent n’était venu à l’idée de personne. Or, lors des législatives grecques du 6 mai, le jour même où en France les électeurs portaient la gauche au pouvoir, les citoyens grecs brandissaient la facture de tant de mépris. Résultat: la Grèce est ingouvernable aujourd’hui et s’enfonce chaque jour un peu plus dans le chaos.
Il aurait fallu, en ce funeste novembre-là, un Hollande aux manettes d’au moins un des pays donnant le la à l’Europe, pour éviter que les choses ne pourrissent. Il est apparu le 6 mai dernier. Et en proposant de renverser la vapeur de l’austérité, il a redonné de l’espoir à des millions de citoyens, y compris en Grèce.
Ceci, parce qu’il a su affronter la fable qu’il n’y a pas d’alternative aux politiques dures menées jusque-là. Quelle assurance dans le mensonge des dirigeants européens! Mensonge démasqué par la victoire de la gauche française.
La pensée unique battue en brèche, le débat redevient possible en Europe. Non, la seule austérité ne pourra pas endiguer la crise. Et si les gouvernements continuent d’être tenus à certains équilibres financiers, il n’est plustabou de rediscuter des règles d’or trop strictes qui asphyxient les Etats. Car sans une politique volontariste venue d’en haut, de là où devraient se prendre les décisions, des gouvernements donc, le continent n’a aucune chance d’échapper à la spirale de la crise.
Du bon sens
Or qui dit relance de l’économie dit aujourd’hui qu’il faut desserrer l’étau de l’endettement et permettre aux citoyens de respirer en augmentant leur pouvoir d’achat et en enlevant au-dessus de leurs têtes l’épée de Damoclès de la précarité.
Voilà le souffle nouveau que le changement de majorité en France apporte à l’Union européenne. Il n’y a là rien de révolutionnaire. Seulement un peu de bon sens dont on a oublié de faire preuve depuis que la crise sévit. Un bon sens qui, s’il ne plaît guère aux chantres du tout économique, redonne de l’espoir aux nombreux citoyens qui, écœurés, ont tourné le dos à l’idée européenne et menacent de céder aux sirènes du repli national voire nationaliste.
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