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La démocratie est en danger en Europe

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C’est un signal dangereux. Le gouvernement grec a osé fermer l’ERT, c’est-à-dire l’ensemble des chaînes publiques de télé et de radio. Sans crier gare et sans prévenir.

Mettant à la porte les quelque 2.500 salariés. Depuis, les petits écrans sont noirs et les ondes sont muettes.
Pourquoi? Parce qu’ils n’étaient pas rentables? Non. Les chiffres de la comptabilité montrent que de ce côté-là le bât ne blesse pas trop. Ce qui a d’ailleurs fait des jaloux dans le secteur privé qui se frotte déjà les mains, puisqu’au final c’est lui, l’audiovisuel privé, qui retirera les marrons du feu. On aura ainsi fait l’économie d’une privatisation de plus, d’une braderie de plus des bijoux de l’Etat.
On aura surtout fait taire des voix journalistiques dissonantes dans la mauvaise passe que subit le pays. Un pas supplémentaire dans l’étouffement de la démocratie, là même où, il y a 2.500 ans, elle est née. Yorgos Germenis, le haineux dirigeant du parti fasciste Aube dorée, l’avait revendiqué lors de sa campagne électorale qui a catapulté sa formation dans le parlement, avec plus de 20 députés. S’il était élu, avait-il fanfaronné, il fermerait l’ERT. Il en a rêvé, le premier ministre Samaras l’a fait.
Qu’il y ait là manigance politicienne faite à la fois pour asphyxier les libertés et donner des gages à l’ultralibéralisme, cela saute aux yeux. Mais il y a pire. Et dans ce pire, les dirigeants grecs ne sont pas les seuls responsables.

Danièle Fonck dfonck@tageblatt.lu

Troïka ou trio d’enfer

Il se fait, en effet, que la troïka, ce trio composé de représentants du Fonds monétaire international, de l’Union européenne et de la Banque européenne – tout un programme! –, pilote désormais le budget d’Athènes et a l’œil sur tout. Chaque centime dépensé par l’Etat est ainsi retourné des dizaines de fois. C’est la condition pour maintenir la Grèce sous perfusion. C’est le couteau sous sa gorge.
Or, la troïka ne jure que sur l’austérité et réclame sacrifice après sacrifice. La saignée a été tragique jusqu’ici. Mais ce n’est pas assez. Dans les cabinets ministériels grecs on fait donc du zèle. On gratte les euros là où l’on peut. On casse les tirelires au hasard. Et voilà justement que l’effort qu’on demande cette fois-ci correspond presque au centime près à ce que coûte l’ERT.
Cela tombe bien: on pourra faire d’une pierre trois coups. Des économies, une muselière, un cadeau au privé. C’est un exemple concret de comment l’austérité dictée par Bruxelles procède. Elle appauvrit les populations secteur après secteur, elle fait qu’on grignote la démocratie, elle sacrifie le domaine public et l’offre sur un plateau au privé.
Voilà une autre troïka qui s’abat sur la Grèce et sur bien d’autres pays européens. Elle est alimentée par un credo ne jurant que sur l’ultralibéralisme. Barroso, que personne n’a élu, en est le grand prêtre. Moins d’Etat, plus
de libéralisme en sont les deux commandements essentiels. Que cela se fasse au détriment des citoyens ne tourmente personne à Bruxelles. Que cela alimente la colère et ouvre un boulevard aux partis politiques extrémistes non plus.
Partout en Europe les populismes ont le vent en poupe. Les politiques d’austérité, en sanctionnant les citoyens, mettent la démocratie en danger. A Bruxelles on s’en fiche. On ne voit rien venir. On ne jure que sur l’austérité. Ceci alors que la plupart des économistes sérieux ne se lassent pas de marteler ce que même un enfant sait: l’austérité casse la machine économique.
Mais elle casse aussi la machine politique. Les socialistes français en savent quelque chose, eux qui d’élection en élection partielles sont éliminés des deuxièmes tours par un Front national ramassant à la pelle les mécontentements, les désespoirs et les colères. Les chantres de l’austérité, Bruxelles en tête, jouent avec le feu en maintenant leur cap ultralibéral. Savent-ils qu’au lieu de sauver, ils dévastent? Ce qu’ils dévastent, c’est la si belle idée de l’Europe des pères fondateurs.