Headlines

Et s’ils avaient raison…

Et s’ils avaient raison…

Jetzt weiterlesen! !

Für 0.99 € können Sie diesen Artikel erwerben.

Sie sind bereits Kunde?

Avant le 25 janvier, jour des élections qui on porté Syriza au pouvoir en Grèce, les Grecs descendaient en masse dans la rue, pour dire leur colère contre leur gouvernement accusé de détruire leurs existences. Or, depuis qu’Alexis Tsipras tient tête à la troïka qui a orchestré l’austérité dans son pays, on continue de manifester à Athènes et dans les autres villes grecques. Mais, cette fois-ci, pour soutenir le gouvernement!

Danièle Fonck dfonck@tageblatt.lu

Cela fait tâche dans notre Europe. Nulle part ou presque, les citoyens crient haut et fort, dans la rue, leur détresse. Nulle part ils ne soutiennent ceux qui les dirigent. Ils sont déçus, ça oui, parce leurs dirigeants sont loin, très loin, de leurs préoccupations. Ils sont en colère même, mais ils n’ont plus l’énergie de manifester. Ils n’y croient plus.

Ils ne croient plus non plus à ce que disent les politiques. Ils préfèrent alors punir leurs gouvernants autrement. Avec leurs bulletins de vote. En votant pour des formations pas encore usées par le pouvoir. Partout ou presque, c’est le populisme d’extrême droite qui peut bomber le torse. Un populisme qui leur désigne un ennemi facile à trouver: les étrangers.

Les Grecs, eux, ont tourné le dos à l’extrême droite. Parce que, à gauche, des hommes et des femmes politiques leur ont fait comprendre que ce ne sont pas les immigrés qui sont à l’origine de la crise qui les étrangle, mais un système économique n’ayant pour objectif que son propre bien-être. Et soudain on se met, en Grèce, à rêver qu’il peut y avoir une alternative à l’austérité prônée partout comme seule cure à la crise.

C’est ce rêve, porté par une équipe gouvernementale rompant avec les tabous de Bruxelles, qui continue de faire descendre les Grecs dans la rue. Et ils y descendent, parce que, cette fois-ci, ils ont peur que leurs dirigeants ne se fassent embobiner par les sirènes bruxelloises.

Quelle belle leçon de démocratie, venue tout droit du pays qui l’a inventée il y a 2.500 ans! Cela rappelle le Chili d’Allende, où les masses populaires craignant l’imminence d’un coup d’Etat défilaient dans les rues de Santiago pour soutenir leur président qui avait osé tenir tête, lui, aux multinationales étasuniennes.

Oui, ils sont un signe de santé démocratique, ces dizaines de milliers de Grecs qui, chaque fois que Tsipras ou Varoufakis, le sulfureux nouveau ministre des Finances, vont plaider la cause grecque dans les capitales européennes.

On sait que „seulement“ quelque 35% des électeurs ont voté pour Syriza, le 25 janvier dernier. Eh bien, d’après les sondages, ils sont, aujourd’hui, 75% à faire confiance à Tsipras et les siens. Du jamais vu!

Elle s’emballe, la cote de popularité de Syriza, parce que le gouvernement s’apprête à revaloriser le salaire minimum et les retraites réduites comme une peau de chagrin par les mesures imposées en échange de prêts pour renflouer les banques. Elle s’emballe, parce que le gouvernement veut en finir avec le chantage de la troïka qui ne dit vouloir venir en aide à la Grèce que si les petites gens font davantage de sacrifices.

A Bruxelles, dans les autres capitales européennes, on devrait saluer, chapeau bas, cette symbiose unique entre le peuple et ses dirigeants. N’est-ce pas cela, cher Jean-Claude Juncker, le but de la construction européenne? Ne faudrait-il pas rêver que les peuples et leurs dirigeants marchent la main dans la main pour construire un monde plus juste? Et tout faire afin que ce rêve-là se réalise?