Que l’aimable lecteur pardonne le jeu de mots (si le substantif branding existe, le verbe „brander“ est ici créé pour un malin plaisir …): il faut bien entrer en la matière imposée, en l’occurrence culture et Nation branding.
Par les temps qui courent, le Luxembourg doit se considérer comme une marque. C’est la thèse d’un comité interministériel. Et une marque, ça se brande, pardon, ça se vend mieux si elle est bien commercialisée, en d’autres termes, si elle se soumet aux lois du marketing.
Mais attention, le marketing d’un produit passé par toutes les étapes du branding suppose la conformité avec les besoins du consommateur. Donc, la marque Luxembourg, le branding Luxembourg (à prononcer en english) doit toujours être à l’affût des tendances lourdes du marché, pour ensuite se profiler dans les meilleures niches. C’est facile si l’on peut se prévaloir d’avantages réels, impossibles de trouver ailleurs.
Nos gens du Nation branding ont détecté trois critères majeurs pouvant être mis en avant dans les campagnes de pub à l’étranger comme dans les démarches officieuses de selling:
1. La stabilité politique, la sécurité, la qualité de vie, les infrastructures solides, donc la fiabilité.
2. La capacité d’adaptation d’un pays qui a muté d’un régime agraire pauvre à une place financière mondiale en passant par un pôle sidérurgique performant, donc le dynamisme.
3. Le multiculturalisme, le multilinguisme, le taux très élevé des étrangers dans la population, donc l’ouverture.
Fiabilité, dynamisme, ouverture: c’est nous, nous sommes fiables, dynamiques, ouverts, venez de partout visiteurs, devenez nos partenaires dans des alliances win-win souples, commodes, enrichissantes!
C’est tout à fait défendable parce qu’innocent; d’autres pourraient dire plus ou moins la même chose, mais le Luxembourg est extra, notamment pour l’ouverture aux idées nouvelles, sub 3.
Parlons très sérieusement maintenant. Oui, le discours du comité interministériel du Nation branding est cohérent. Il lui revient même le mérite de stimuler la réflexion importantissime, prioritaire, sur les finalités du multiculturalisme: ne sert-il pas mieux que toute autre pratique quotidienne les affinités réciproques, donc la compréhension, la cohésion, la solidarité?
L’éloge fait, il doit être permis de poser les questions corollaires. Les acteurs de la vie culturelle (dans le sens large) peuvent-ils compter sur un appui public en concordance avec les exigences du multiculturalisme, du multilinguisme et de l’émulation autochtones/étrangers?
L’auteur de ces lignes n’aperçoit nulle part les contours d’une politique culturelle qui permettrait, par exemple, l’éclosion et la promotion ciblée de la littérature et des arts luxembourgeois en général. Nos bons écrivains, peintres, sculpteurs, compositeurs et autres artistes ne disposent pas des moyens de se faire connaître au-delà des frontières, alors qu’ils pourraient rehausser, par l’excellence de leurs travaux, le Nation branding, trop limité au business finalement.
Le business gagnerait beaucoup, en respectabilité et en noblesse, s’il prenait en remorque l’identité culturelle d’un Luxembourg en évolution permanente et passionnante.
Et voilà la boucle bouclée: la dernière phrase ici sera, en répétition, le titre.
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