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LeserforumUne nouvelle constitution en attente d’une révision linguistique

Leserforum / Une nouvelle constitution en attente d’une révision linguistique
 Foto: Editpress/Fabrizio Pizzolante

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Lorsqu’ils se sont penchés sur le texte de la nouvelle constitution, nos 60 députés semblent parfois avoir négligé le bon usage de la langue française, voire la logique, ce qui les a conduits à accepter des tournures qui n’ont pas de sens. Or que valent des articles constitutionnels qui n’ont pas de sens? Rien!

L’article 64, point 3 nous en fournit un premier exemple. Il y est dit que les juridictions peuvent „prononcer l’interdiction du droit de vote et d’éligibilité“. Je veux bien qu’on prononce l’interdiction de l’exercice du droit de vote ou la suspension du droit de vote ou qu’on interdise un électeur – de même que l’on interdit un prêtre – ou encore qu’on ôte le droit de vote, mais j’ai de sérieux problèmes avec la tournure adoptée par nos députés. Je n’ai encore jamais lu ou entendu l’expression „interdire un droit“.

Prenons ensuite l’article 50, point 2, où les choses deviennent plus graves. Nous y lisons: „Aucune fonction salariée par l’Etat ne peut être créée qu’en vertu d’une loi“. Ici, c’est le logicien en moi qui voit rouge. Il faudrait en effet dire: „Une fonction salariée, etc.“ ou alors quelque chose du genre „Aucune fonction salariée par l’Etat ne peut être créée en dehors de la loi“. Mais la formule choisie ne veut rien dire en bon français et en bonne logique. Il faut absolument la changer avant l’entrée en vigueur de la Constitution! Comment a-t-on pu laisser passer une telle aberration logico-linguistique?

Continuons avec l’article 62. Il y est dit que les députés „ne peuvent avoir en vue que l’intérêt général“. Ici, il aurait été plus judicieux d’écrire „ne doivent avoir“. Par le „ne peuvent avoir“ on peut en effet aussi entendre „ont toujours“. Ainsi lorsqu’un fabricant dit de son produit qu’il est si bien fait qu’il ne peut pas tomber en panne. L’article 62 ne veut pas constater une impossibilité, mais énoncer une obligation. Or pour faire cela, il est plus approprié d’utiliser le verbe „devoir“.

L’article 50, point 1 contient une belle redondance – ce qui en soi n’est toutefois pas grave. Il y est dit que le Grand-Duc „nomme aux emplois publics, conformément à la loi, et sauf les exceptions établies par elle“. Si l’exception est établie par la loi, le Grand-Duc nomme conformément à la loi en tenant compte de ces exceptions. Pourquoi dire deux fois la même chose?

Des lecteurs plus perspicaces que moi trouveront peut-être encore d’autres formulations qui devraient être changées. Pour ma part, j’invite nos députés à faire un peu plus attention à la langue et à mieux faire relire leurs textes. Une Constitution n’est pas une rédaction de Toto – Pittis Aufsatz.

Notons, pour terminer, que dans tout le texte de la Constitution, on utilise toujours le masculin (le député, l’électeur, le Grand-Duc, …). Cela ne me dérange pas et j’espère que les députés et députées qui ont adopté une Constitution sans écriture inclusive s’abstiendront de faire des lois obligeant l’administration ou de simples quidams à utiliser cette écriture.

Grober J-P.
30. September 2022 - 9.37

Ass eng "Constitution" och op Lëtzebuergesch méiglech?