Riss a dû faire des heures supplémentaires pour signer à la „une“ de Charlie Hebdo un dessin qualifié de „saisissant“ par le quotidien Le Soir. Son sujet: le visage de Stromae sur fond de drapeau belge et des membres arrachés, le chanteur cherchant son père, allusion à la chanson „Papaoutai“.
Certes, on peut polémiquer sur le sujet quand on sait que le père du chanteur belgo-rwandais a été tué lors du génocide des Tutsis et découpé en morceaux. Pourtant! N’est-ce pas exactement ce qui se passe avec ces terribles attentats avec lesquels l’Europe et le monde n’ont pas terminé, Stromae pouvant être n’importe qui?
Les journalistes de Charlie Hebdo sauvagement assassinés avaient chacun un proche, un(e) compagnon, un enfant. Les victimes des terrasses parisiennes et celles du Bataclan avaient des parents, des amoureux, des amis. Tous se retrouvent avec, dans leur tête, l’image de corps ravagés, de même d’ailleurs que les survivants des massacres qui, dans tel ou tel autre hôpital parisien ou bruxellois essaient de survivre avec, nuit et jour, devant leurs yeux ces jambes abandonnées sur un tapis roulant, un hall d’aéroport, une salle de spectacle. Sachant que les meilleures prothèses au monde ne leur permettront jamais de marcher sur l’herbe, ressentant le moelleux de la mousse sous leurs pieds …
Aujourd’hui, il faut montrer l’horreur. Celle qu’il fallut montrer hier au Vietnam quand les Américains ont déversé des millions de tonnes „d’agent orange“ sur une population innocente. Expliquer à quoi mène la religion quand elle n’est plus que fanatisme et la politique lorsqu’elle a perdu toute notion d’éthique. Témoigner de ce dont les hommes sont capables, des ignominies les plus infâmes qui ne les touchent plus.
La discussion sur Charlie va bizarrement de pair avec une autre polémique, née d’une inélégance de la ministre française du Droit des femmes qualifiant les femmes voilées aux „nègres pour l’esclavage“. Passons sur le propos pour le moins incongru pour mieux suivre le clivage aussitôt apparu entre féministes dites „modernes“ et féministes „traditionnelles“. A noter que les premières soutiennent ces grandes marques de mode qui font leur communication sur les collections „voile“, sous prétexte que les femmes musulmanes en Occident exprimeraient désormais un choix en optant pour le voile.
Un choix? Quel choix?
De tout temps, les femmes se sont chapeautées, ont porté des foulards, des „fichus“ à la campagne ou dans les milieux modestes. Les paysannes pour s’abriter du soleil dans les champs, les humbles souvent pour cacher des cheveux mal soignés, les riches parce que Hermès a su tirer son épingle du jeu (ou son carré du tiroir), les bigotes pour aller à l’église. Le turban était un temps devenu l’apanage de celles qui avaient perdu leurs cheveux et redoutaient le regard d’une société coincée. Et il y eut celles qui simplement admiraient et/ou adorent le couvre-chef.
Est-ce cela le voile islamique? Non, évidemment pas.
Le voile a, dans l’islam, une signification purement religieuse et cela, les grands couturiers devraient le savoir. Ils feraient acte de dignité en avouant que leurs collections récentes ne sont rien d’autre que des actes commerciaux pour assurer la „shareholder value“ à leurs actionnaires.
La liberté de la femme consiste à être égale en droits et égale en respect. Egale au travail, égale à l’école et notamment en cours de sport, à la piscine, à la plage.
Le libre choix du voile, du niqab? De quoi s’arracher les cheveux. N’avons-nous toujours pas compris à quel point le „politiquement correct“ tue nos démocraties?
dfonck@tageblatt.lu
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