Headlines

L’Histoire, une somme d’histoires

L’Histoire, une somme d’histoires

Jetzt weiterlesen! !

Für 0.99 € können Sie diesen Artikel erwerben.

Sie sind bereits Kunde?

Et si j’écrivais ce premier édito de la nouvelle saison en luxembourgeois? Ou en allemand? En anglais? En italien? Pour le portugais, il me faudrait un traducteur, mais: traduttore traditore; l’autre, fût-il excellent, n’arrive jamais à transmettre le sens exact des mots et des phrases parce que les langues ont une personnalité insondable, insaisissable. Heureux celui qui en connaît plusieurs, qui les cultive pour les posséder enfin, mais toujours dans une certaine mesure, restons modestes.

Les Allemands, les Français, les Italiens, les Anglais, les Espagnols et tant d’autres grands peuples ont résolu le problème de leurs parlers différents, les dialectes et les patois, en se donnant une langue codifiée, la Hochsprache. Sinon, comment s’entendraient-ils?

Mon grand-père de W., là-haut, dans le nord, se moquait des locuteurs du Lëtzebuergesch de Luxembourg en déclarant: „Ich schwätzen drei Sproochen: Ditsch, Deitsch an Iislekesch.“ Pour lui, c’était la même chose. Son journal luxembourgeois mais fait en allemand, il le mettait de côté en soupirant: „Für Wahrheit zu schlecht.“

Comment oublier cela, comment oublier ma surprise ce jour où, à Luxemburg, Minnesota, en feuilletant le registre paroissial, je lisais des dizaines de noms bien de chez nous, Peter Schneider, Barbara Schickes, Johann Wagener, etc., qui déclaraient être nés à Luxemburg, Deutschland? – Ils avaient quitté leurs villages d’ici pendant les années de misère, au 19e siècle, pour tenter leur chance outre-Atlantique, armés de leur seule volonté de vivre, de survivre.

L’Histoire est une somme d’histoires. L’Histoire du Grand-Duché conduit ceux qui en connaissent les péripéties à conclure que ce pays, parce que situé au carrefour de plusieurs grandes nations, parce que tellement petit lui-même, parce que sans ressources naturelles, parce que soumis aux dures lois de l’économie de marché, ne peut conserver sa richesse actuelle, son indépendance et son identité qu’en s’ouvrant largement, sachant bien que l’ouverture est la force motrice d’une évolution dans l’ensemble bénéfique.

Au 19e, on crevait de faim dans les campagnes de ce pays, et la ville-forteresse vivait sous la botte de sa garnison prussienne. Au 20e, deux guerres monstrueuses ont failli radier le Luxembourg de la carte des Etats. En fait, „nous“ avons été sauvés par le miracle politique de l’intégration européenne, qui est loin d’être achevée, et que nous avons bien davantage orientée que ne l’aurait permis le nombre d’habitants pris au prorata. Etrangers compris, nous sommes un pour mille de la population de l’UE des 28.

Et si notre excédent d’influence, duquel découlent nos avantages, était dû, notamment, à notre maîtrise du français et de l’allemand, maîtrise qui nous a ouvert les portes de deux grandes cultures … et de deux grandes économies?