Le Luxembourg a-t-il besoin de radios? Oui, évidemment.
A-t-il besoin d’une télévision? Bien sûr.
L’audiovisuel doit-il être de service public ou privé? La première solution serait la plus logique, mais le passé en a décidé autrement. Ce que les Luxembourgeois qualifient communément de RTL est pour eux synonyme de service public radio et télé. Même si l’actionnaire est l’un des acteurs privés du monde des médias, à savoir l’allemand Bertelsmann.
Certes, en échange de multiples avantages, fixés dans le cadre d’un contrat de „concession“, la CLT-UFA, et à travers elle RTL, est censée satisfaire à un cahier des charges, dont un certain nombre de tâches de mission publique, dans le respect des règles déontologiques propres à la profession journalistique.
L’affaire Thoma-Schram a fait éclater au grand jour ce qu’il en était. L’audimat, unique critère de ventes publicitaires et donc de revenus commerciaux, était, et reste, roi. Comme à TF1 par exemple où l’ancien CEO avait avoué avec une admirable honnêteté que le cœur de son métier était de rendre „le cerveau humain disponible“, et de mettre ce fameux temps à disposition de Coca-Cola, ce dernier pouvant ainsi mieux vendre ses produits à des esprits malléables.
L’écoute maximum exige un populisme certain. La qualité est bien moins vendeuse. Mais il serait injuste de manquer de nuances et de faire croire que RTL Télé ne serait que du bas de gamme et du journalisme au rabais. Ce serait faire insulte à des professionnels qui font leur métier.
Aujourd’hui, et suite à l’affaire évoquée devenue l’affaire Berwick-Thoma-Schram, avec comme dégâts collatéraux quelques départs autres, Bertelsmann signale ne plus vouloir payer pour la télé. Et demande à l’Etat de passer par la caisse.
Reste à savoir ce que vaut cette télé dans le contrat de concession néanmoins juteux et quelles seront les limites imposées à l’acteur allemand en échange de monnaie sonnante et trébuchante issue des poches des contribuables. A savoir aussi comment l’Etat, dans un souci de pluralisme garant de la démocratie, entend faire pour protéger les médias locaux traditionnels.
Le Luxembourg n’est pas l’Islande, et l’Islande n’est pas la Suisse. Ce n’est pas parce que le législateur d’antan a voulu instaurer une radio „öffentlich-rechtlich“ qu’il faudrait transférer RTL Télé
à 100,7. Pour satisfaire quelque ambition personnelle. Car ladite „öffentlich-rechtlich“ demeure, après plusieurs années, très confidentielle et bien loin des préoccupations du citoyen lambda. Qualité oui, au prix fort d’ailleurs pour le contribuable, velléité d’audimat au prix de „Schram journalisme“ (ainsi s’élargit le glossaire des termes journalistiques) … L’Etat devrait-il payer deux fois désormais? Pourquoi? Et pour quelle plus-value?
A l’ère du numérique et des mutations de la société, les habitudes changent. Beaucoup des actuels „millennials“ se passent déjà de télévision, l’information étant partout et mobile, l’information étant celle assurée par de vieilles bonnes marques de presse, des journalistes, des sources et du savoir-faire.
La confusion actuelle est entretenue par d’aucuns qui confondent volontiers les pommes et les poires. Avec des complicités étonnantes. Mais les plus savantes nébuleuses finissent par devenir transparentes. Le citoyen n’est, en tout état de cause, pas une vache à lait à la disposition d’egos démesurés. Les élus et gouvernants devraient le savoir.
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