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Les grèves ont été suivies

Les grèves ont été suivies

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De notre correspondant Bernard Brigouleix, Paris

Les grèves et les manifestations organisées un peu partout hier en France – on a compté plus de 180 cortèges de protestataires – ont à l’évidence mobilisé assez largement ceux qui s’inquiètent de l’avenir du statut de la SNCF et du Service public en général. Mais l’issue du combat des syndicats et de la gauche politique pour obliger le pouvoir à renoncer aux réformes reste incertain, et l’épreuve de force semble promise à se poursuivre.

La France aura donc renoué hier avec un des plus solides rituels de sa vie publique, avec une journée marquée par les grèves dans le Service public, principalement à la SNCF, et les manifestations contre la politique économique et sociale du gouvernement. Cette fois-ci, c’étaient plus particulièrement les projets de réforme de ce dernier à propos du statut des cheminots pour les nouvelles générations (les salariés actuels conservant leurs avantages) qui étaient visés, même si l’ensemble des fonctionnaires étaient appelés à faire grève.

Autre rituel qui aura été, une fois encore, scrupuleusement observé: la bataille des chiffres à propos des effectifs rassemblés par les cortèges de protestataires. Un certain nombre de grands médias français de différents secteurs ont d’ailleurs décidé de mettre au point, collectivement, leur propre système de comptage, afin d’éviter la double citation traditionnel des chiffres fournis par les organisateurs, et de ceux que donne la police …

A ce stade, et pour autant que l’on puisse désormais disposer d’évaluations à la fois globales et impartiales, la journée d’action des syndicats, relayée par la plupart des partis de gauche et d’extrême gauche, ainsi que par une fraction très minoritaire de l’extrême droite (le mouvement des patriotes, dissidence de l’ex-Front national), semble avoir assez inégalement réussi la mobilisation escomptée: quoique non négligeable, le test reste, de ce point de vue, à confirmer.

Un trafic SNCF réduit de moitié

On a ainsi compté quelque 35 pour cent des cheminots en grève (et même 40 pour cent chez les conducteurs de train), avec un trafic TGV, grandes lignes et banlieue, réduit environ de moitié, et 30 pour cent des vols courts et moyens-courriers annulés à Paris. Mais nettement moins dans l’Education nationale, où seuls quelque 15 pour cent du personnel ont fait grève, cependant que le trafic des métros et bus de la capitale restait quasiment normal. Et moins encore dans l’ensemble de la Fonction publique même si le malaise, dans le secteur hospitalier notamment, de même que dans l’administration pénitentiaire, est à l’évidence très fort.

Quant aux manifestations, elles ont été incontestablement fournies, et presque toujours unitaires. On a relevé quelques débordements en province, en particulier à Nantes, où des casseurs sont entrés en action en marge du cortège syndical, provoquant les habituels dégâts matériels, quelques blessés dans les rangs des forces de l’ordre, et huit interpellations en flagrant délit. A Marseille, les organisateurs se flattent d’avoir réuni 50.000 protestataires, chiffre évidemment exagéré (la préfecture parle de 10.000 personnes) mais qui n’en reflète pas moins un réel mécontentement populaire.

A Paris même, où était organisée «la» grande manifestation nationale, vers laquelle avaient convergé dans la nuit et la matinée des centaines de cars venus de toute la France, deux démonstrations différentes, celle des cheminots partie de la gare de l’Est, et celle des fonctionnaires d’abord rassemblés devant le ministère des Finances, devaient ensuite fusionner pour former un cortège massif d’où ont constamment fusé les slogans et les huées à l’adresse du gouvernement.

 Coup d’envoi d’une opération plus vaste 

Cette journée, attentivement observée de différents côtés, était de toute façon considérée comme importante, voire décisive, et cela pour plusieurs raisons. La première étant évidemment qu’elle constituait, un peu moins d’un an après l’élection d’Emmanuel Macron à l’Elysée, le deuxième grand test pour les syndicats, après celui qui les avait vu, à l’automne, perdre leur premier bras de fer à propos de la réforme du Code du travail. Et cette nouvelle épreuve de force survenait dans un contexte plus favorable pour eux, une indéniable grogne sociale étant en train de gagner une partie de la population, y compris dans une catégorie traditionnellement peu encline à la contestation: les retraités, dont les pensions baissent sensiblement.

Si les syndicats attachaient autant de prix à la réussite de cette journée d’hier, c’était aussi, voire surtout, en tant que coup d’envoi d’une opération plus vaste contre le pouvoir macroniste. Car nombre de leurs dirigeants redoutent que l’arrière-pensée de ce dernier ne soit en fait, au-delà d’une modernisation du Secteur public plutôt bien vue de l’opinion d’après les sondages (si le recours aux ordonnances, lui, ne l’est pas) une privatisation rampante, ou au moins une réduction sensible du pouvoir des syndicats dans la Fonction publique. Avec, corolairement, une précarisation de ses emplois jusqu’alors garantis à vie, ou peu s’en faut.

La journée d’hier devait constituer, aussi, une première occasion pour la gauche politique de vérifier si elle était capable de se rassembler, après le séisme électoral macroniste de l’an dernier, et de se remobiliser. Et cela à l’initiative-surprise, et efficace, du leader de la petite formation trotskiste du Nouveau Parti anticapitaliste, Olivier Besancenot, ex-candidat à l’élection présidentielle, qui a par une lettre ouverte placé les représentants d’autres formations d’extrême gauche devant leurs responsabilités unitaires. Même si, pour sa part, Jean-Luc Mélenchon n’a pas voulu signer cette déclaration devenue commune, au motif que «l’union de la gauche n’est pas à l’ordre du jour» – tout comme la rivale en trotskisme de Besancenot, Nathalie Arthaud, leader de Lutte ouvrière.

On aura aussi remarqué, sur ce terrain, que les socialistes se trouvaient contraints de faire bande à part; leur très probable futur premier secrétaire, le député Olivier Faure, a d’ailleurs été copieusement sifflé lorsqu’il s’est présenté gare de l’Est pour participer au défilé des salariés de la SNCF. Manifestement, le PS, dont plusieurs anciens hauts responsables occupent aujourd’hui des postes éminents dans le gouvernement macroniste d’Edouard Philippe (Affaires étrangères, Intérieur, Justice, Agriculture, etc.) et qui porte toujours le fardeau psychologique du quinquennat de François Hollande, n’a pas encore retrouvé sa place dans l’opposition de gauche, sans parler de la scène politique nationale.

Le souvenir (ambivalent) de Mai 68

La tentation est grande, en tout cas, pour cette opposition, qu’elle soit politique ou syndicale, de fédérer les mécontentements, et d’essayer de prendre dans la rue et dans les entreprises, en surfant sur les inévitables déceptions engendrées comme toujours par la nouvelle équipe, la revanche des élections présidentielle puis législatives de l’an dernier. A quoi, justement, le pouvoir répond qu’il ne fait actuellement rien d’autre que ce qui était annoncé dans le programme finalement victorieux d’Emmanuel Macron, puis (quoique bien moins nettement …) dans celui des candidats de La République en marche lors des deux campagnes de 2017.

Tout le monde, dans les deux camps, s’interroge maintenant sur la suite des opérations. On observera avec un intérêt particulier, à cet égard, comment se poursuit la grève à la SNCF, selon un nouveau système d’arrêts de travail de deux jours par semaine, qui permet de limiter les pertes salariales des grévistes en assurant un roulement, tout en «désorganisant» la société publique, selon le mot d’ordre d’un texte interne à la CGT récemment révélé, et qui fait polémique. Le risque étant pour les syndicats que l’opinion, dont les grèves compliquent évidemment beaucoup la vie quotidienne – et singulièrement celle des salariés les plus modestes – ne se lasse assez vite d’une telle désorganisation, et même peut-être des manifestations qui vont avec.

L’expérience des journées successives de mobilisation contre la loi El Khomri sous la présidence Hollande, puis contre la réforme du Code du travail sous Macron, a montré que la répétition méthodique des opérations de contestation peut être une arme à double tranchant, et jouer finalement en faveur de ceux qu’elle prétendait faire plier. C’est donc un dispositif dont l’opposition politique et surtout syndicale va devoir user avec doigté. Le cinquantième anniversaire des événements de mai 1968 (qui avaient commencé, en fait, dès le 22 mars) fait en ce moment couler beaucoup d’encre en France, et alimentent sans doute bien des rêves, mais lesdits événements s’étaient tout de même terminés par une écrasante victoire électorale de la droite …

Realist
23. März 2018 - 15.55

Eine Fahne mit dem Konterfei von Che Guevara bei einer Streikdemo in Frankreich? Ernsthaft? Da fragt man sich doch, in welchem Paralleluniversum gewisse Leute offenbar leben.