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Péril en la demeure

Péril en la demeure
(Tageblatt)

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Eva, Jean-Claude et les autres

Les libraires vendent son livre par piles entières. Preuve que les Luxembourgeois ou du moins les résidents du Grand-Duché, sont intéressés au plus haut chef par les affirmations de l’ancienne magistrate française et actuelle députée européenne verte Eva Joly. Celle qui n’avait pas hésité à mettre jadis en prison Loïk Le Floch-Prigent, ce grand patron français dont elle a ruiné ainsi la carrière et la santé, n’y va pas de main morte. Si un tiers seulement de ses dires étaient vrais, le président de la Commission européenne aurait du mal à se sortir d’affaire avec une pirouette. En dépit de ses vieilles amitiés en politique (européenne), souvent fondées d’après la Franco-Norvégienne, sur une complicité malsaine débouchant sur des menaces.

dfonck@tageblatt.lu

Mme Joly est, certes, perspicace. Elle est une idéologue et elle est hargneuse. Elle est surtout intelligente et remarquablement bien informée et dangereuse, car elle poursuit sans tergiverser un objectif à mettre un terme aux activités lucratives du Luxembourg, „un pays né de la grande pauvreté“ dont elle envie plutôt que n’apprécie ce qu’elle qualifie de „grande richesse“, parce que cette richesse est, à ses yeux, fondée sur une gigantesque escroquerie politique et morale, d’où son combat pour le mettre à nu et stopper net son essor.

Elle oublie volontiers que le Grand-Duché n’a jamais demandé à exister en tant qu’Etat, qu’il est une création des grands Etats. Comme elle fait l’impasse sur le fait que depuis tout temps, les citoyens y ont travaillé dur. Et si les niches de souveraineté ont été exploitées, elles l’ont été légalement et avec l’appui de grandes nations voisines et plus lointaines qui y trouvaient leur propre intérêt. Il n’en reste pas moins que le livre d’Eva Joly est un poison qui pourrait affaiblir dangereusement le Luxembourg dans la mesure où elle dénonce trente ans de pratiques politiques inacceptables. Pourquoi?

A cause des complicités entre les politiques au pouvoir et le monde des affaires. S’il est de bonne guerre que les acteurs de la place financière fassent leur métier avec les moyens à leur disposition, il n’est pas normal que des premiers ministres ou ministres de la Finance deviennent des hommes de main tout terrain du monde financier. En provoquant des réactions de la part des Etats membres de l’UE sur les agissements mis en évidence, Eva Joly accélère le processus de dénigrement qui s’achèvera par une mise sous tutelle du Grand-Duché par les instances internationales.

La dame a bien choisi son moment: LuxLeaks et Panama Leaks sont passés par là et il est de bon ton de défendre les „whistleblowers“ qu’elle présente savamment comme les „Harry Potter“ qu’ils ne sont pas. Mais le politiquement correct de l’époque la servira dans son combat contre la „Corporate“ qui applique „un salaire minimum, équivalent du salaire médian en France …“

Au CSV on est vent debout contre la burqa pour revenir au pouvoir. Après avoir lu Joly, le parti chrétien-social devrait aller à confesse et solliciter 30 ans d’opposition pour réfléchir sur ses actes passés, ses responsabilités colossales et le comment et le pourquoi de la corruption morale. Il y va désormais de l’existence d’un pays et de sa jeunesse, demain.
Jean-Claude Juncker est mis à nu comme il ne l’a jamais été. Soyons honnêtes: à bien des égards injustement. Mais peut-être a-t-il trop parlé, trop aimé les feux de la rampe, les micros et les caméras. Peut-être a-t-il confondu saine distance et familiarité excessive et, peut-être, lui toujours peu et souvent pas très bien entouré, est-il devenu autiste. La notoriété est un acte de trapéziste. Il faut réussir, encore et encore, pour ne pas tomber. Et on chute le jour où on n’a plus le trac, plus de doutes, plus d’angoisses.

„Le loup dans la bergerie“ (Editions Les arènes) laissera des traces profondes. C’est d’autant plus dommage que ni le Luxembourg, ni l’homme Juncker ne méritent autant de haine, de mépris, de rage.
La Norvégienne Joly a choisi la France par mariage interposé. France qui, au début du XXe siècle, „connaît alors surtout les bonnes Luxembourgeoises qui arrivent perdues Gare de l’Est …“

France dont les Luxembourgeois du XXIe siècle ne connaissent pas seulement les voisins lorrains, mais la culture, l’architecture, l’histoire, les paysages, les universités, les centres de recherche. France dont ils ont accepté d’adopter la langue comme véhiculaire. La Scandinave puriste et fondamentaliste pourrait au moins reconnaître au Luxembourg le mérite d’avoir l’esprit plus ouvert que la France dont elle se fait l’écho.