Guy van Hulle sur le début de la fin de la politique du tout à la voiture
Alors qu’on le croyait banni et disparu de la circulation à vie, voilà que le tramway new-look vient de faire sa réapparition. Il faut dire que le tram, le 10 décembre dernier, avait bien choisi son moment alors que la neige commençait à tomber dru pour se présenter au public luxembourgeois connu pour être très accroc à sa sacro-sainte bagnole et que lui, contrairement aux grosses limousines allemandes, n’avait aucun mal à faire ses preuves en ne patinant point et en avançant droit sur ses rails, fournissant ainsi d’entrée la preuve de son utilité publique …!
On se souvient que quelques 53 ans en arrière ceux qui lui restaient très attaché(e)s en regrettant sa disparition imminente ne purent rien faire contre ses détracteurs qui le trouvaient ringard et les décideurs d’époque optant béatement pour la politique du tout à la voiture mais ignoraient encore que celle-ci allait les conduire un jour droit dans le mur de la pollution et des bouchons sans issue.
Si ceux qui firent arracher les rails ne pouvaient pas se douter qu’on allait les reposer un demi-siècle plus tard, ce qui se passe aujourd’hui amuse néanmoins et nous fait instinctivement penser aux habitants des deux villes bien connues et jumelées de Clochemerle et Schilda …!
Le tram et le tortillard, les malaimés …
Parmi les pourfendeurs les plus virulents à la fois du tram et des chemins à voie étroite «Charly» et «Jangeli» – leurs sobriquets – il faudrait citer en tête le sieur François Mersch décédé en février 1983, un personnage de la capitale attachant aux goûts éclectiques et à multiples facettes comme on n’en voit plus malheureusement. Gentleman-sportsman et athlète de haut niveau, ce fut surtout en sa qualité de fondateur et patron de l’Autorevue que «Miersche Fränz» crût avoir de bonnes raisons pour fustiger le transport en commun considéré comme vieillot d’un côté et encourager la vente de voitures particulières de l’autre … Quelque huit ans après avoir eu la satisfaction de voir disparaître sa bête noire, le «Charly» honni qu’il qualifia en son temps de vestige préhistorique, voilà que le non moins gênant tram rentra pour de bon au hangar du «Trump’s Schapp»…
Le borgne, les cars Chausson et la Fiat
Bien calfeutré à l’arrière de l’italienne, je me rendais compte que mes parents, en tant que tout récents détenteurs du permis de conduire et encore novices en la matière, s’en méfiaient également au point de se crisper derrière leur volant dès qu’ils virent le tram éclairé d’un seul et faible phare virer à leur rencontre dans la côte d’Eich. Vociférant et en le traitant de tous les mots et notamment de cyclope, mon paternel de toute façon lui en voulait depuis que durant la guerre sur son vélo quelque peu déconcentré par un contrôle allemand en amont, il avait fait un vol plané par-dessus les rails qu’il s’était pris non loin de là. Ne partageant déjà pas forcément l’hostilité de mes géniteurs à son égard, son retour actuel sous une forme new-look du coup n’est pas pour me déplaire.
Sûr qu’il fallait parfois, en suivant le tram en voiture, avoir des nerfs d’acier – «Nerve wéi Tramschinnen», une expression qui s’est maintenue dans le langage courant, au-delà du temps alors n’y avait plus tram ni rails depuis belle lurette, mais qui risque de redevenir d’actualité une fois tout le réseau achevé … A noter que dans le Sud également, les gens, pendant un bon bout de temps encore, continuaient à parler d’aller prendre le tram („den Tram huelen“) alors que le T.I.C.E. avait fait remplacer son «Minettstram» par des bus depuis des années … fournissant ainsi la preuve qu’ils y restèrent sentimentalement attachés et que l’ancêtre électrique restait bien ancré dans la mémoire collective du pays.
De Beggen à Cloche-«Merl»
Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes, s’il n’y avait pas cet article défini, certes tout à fait correct grammaticalement parlant, changeant le tramway en «die Tram» (Trambahn) en allemand, mais qui riment par trop avec … «die Milram» voire «die Merkel», fait que j’ai du mal à m’y faire en lisant nos journaux … Mais arrêtons de railler pour ne pas en sortir; ce qui est sûr, c’est que j’ai pris le tram en marche quand j’étais minot comme dirait Devos, pendant que le grand Jacques, lui, attendait le 33 pour aller conter fleurette à Madeleine avec ses bonbons. Longtemps après Grenoble, Lille, Reims et Bordeaux et un manque de transparence durant lequel on ignorait ce qui se tramait, voilà celui de Saragosse enfin arrivé chez nous.
Cela étonne, vu qu’on était habitué à voir les hispaniques plutôt exporter à part leurs très mignonnes guérites en forme de tourelles, leur vin pas vilain, leurs fruits trop beaux pour être bio, le nougat d’Alicante, le courroux catalan, passe encore pour leurs Seat sous licence, mais alors un tram …!?
Pour une fois qu’on ne s’est pas fourni en Allemagne, haha …, on attendra pour voir si les pantographes ne retomberont pas en panne. Alors qu’il n’y a aucune raison pour que le matériel ne soit fiable, il faudrait plutôt se soucier des conditions de travail et des contrats des conducteurs formés sur le tas de gravats. On ne les appellera cependant plus wattmen, vu qu’avec les coureurs cyclistes boostés au salbutamol ou autres dopants ceci pourrait prêter à confusion!
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