Art. 3
L’article 3 stipule: „La souveraineté réside dans la Nation dont émanent les pouvoirs de l’État“.
C’est la seule fois dans tout le texte que le mot „Nation“ apparaît. Pour savoir ce que l’on entend par „Nation“, il faut se reporter à l’exposé des motifs du projet de loi N° 7700 du 29.12.2020. On y apprend que la notion de nation „est à prendre dans un sens large qui se confond de nos jours largement avec celui du peuple“. Une manière compliquée de dire, sans doute, que les notions de nation et de peuple sont synonymes. Si tel est le sens du législateur, il faut alors se demander: „Que signifie la notion de peuple?“.
Comme les pouvoirs de l’État émanent de la Nation (Art. 3), il faut considérer que le peuple est la partie de la population luxembourgeoise qui a le droit de voter aux élections nationales (Législatives). Ainsi, le peuple n’est pas constitué de la population du pays, mais des détenteurs de la nationalité luxembourgeoise. Le Luxembourg est donc une „nation composée de nationaux“. C’est certes mieux qu’une nation ethnique basée sur la parenté du sang, mais c’est néanmoins problématique en raison de notre situation démographique très particulière. Car 57% de la population ont une nationalité autre que celle du Grand-Duché de Luxembourg. Cela représente 367.092 personnes sur une population totale de 645.397 personnes (Statec, 1er janvier 2022). Le nombre de 367.092 comprend 62.925 personnes qui ont plus d’une nationalité. Grâce à la mesure de la double nationalité, nous avons réussi jusqu’à présent à maintenir la proportion d’étrangers dans la population totale juste en dessous de 50%.
Art. 62
Encore quelques mots sur l’article 62, c’est-à-dire l’article qui détermine qui est représenté par notre parlement. Le soussigné note avec satisfaction que l’ancienne formule „La Chambre des Députés représente le pays“ a été conservée. Parce qu’à un certain moment, il a été question de remplacer le mot „pays“ par le mot „nation“. Même si les résidents étrangers, qui apportent une très grande contribution à la richesse économique, sociale, culturelle et sportive du pays, n’ont pas le droit de vote, ils auraient tout de même le droit d’être représentés par les parlementaires, comme ils font partie intégrante du pays. En fait, ce devrait être le cas, car l’article 62 stipule aussi que les députés votent sans en référer à leurs électeurs et qu’ils „ne peuvent avoir en vue que l’intérêt général“ du pays.
Dernier point: si un certain parti populiste de droite n’ose pas répandre au Luxembourg des thèses ethnico-nationalistes, en raison de l’énorme brassage ethnique du „peuple“ luxembourgeois (donc de la „Nation“), sa tentative de réduire le Luxembourg à une nation unilingue ne marche pas non plus. Pourquoi? Parce qu’un grand nombre de nouveaux Luxembourgeois, tout en ayant le droit de vote, ne comprennent pas la langue luxembourgeoise et ne savent pas l’écrire.
Conclusion: Le Luxembourg ne peut être considéré ni comme une nation ethnique ni comme un pays unilingue. Le Luxembourg a été, est et demeure une nation et un pays multilingue. Nous, les détenteurs du droit de vote, aurons peut-être un jour le courage de reconnaître la réalité „multinationale“ de notre petit pays, et d’accorder – sous certaines conditions – à nos concitoyens étrangers tous les droits politiques, leur permettant de participer pleinement à la construction de l’avenir de notre pays et à l’avancement de cette communauté de destin unique.
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