Il y a cent ans, en 1917, une guerre sévissait, grande comme le monde, devenue la première boucherie de masse des temps modernes. Ainsi se refermait définitivement le 19e siècle. Mais alors que dans les tranchées de la Marne et de la Somme on se massacrait, la révolution éclatait en Russie, dès février, et la face du globe en serait changée.
C’est sous ce double signe, horreur d’un côté, espoir des peuples de l’autre, que 1917 a promis à l’humanité le pire en même temps que le meilleur. Un meilleur qui n’allait cependant pas tarder à montrer avec le stalinisme un visage aussi laid que ce qui se tramait en Italie, en Allemagne et en Espagne et que, parce que nous n’avions pas d’autre mot, nous avons fini par appeler totalitarisme.
Cela a engendré les camps de la mort d’un côté, le goulag de l’autre, et une seconde déflagration plus cruelle que la première, mais de celle-là, en 1945, on croyait qu’elle nous guérirait de l’horreur. La guerre est alors devenue froide, entre Ouest et Est, jusqu’à ce qu’un des deux camps implose et que la planète soit ramenée à peu près là où elle se trouvait avant 1917, enterrant l’utopie et ouvrant une voie royale au capitalisme revitalisé.
Un capitalisme allant puiser dans ses vieux réflexes, imposant sa loi de la jungle plutôt que celle d’un monde civilisé. Ce qui fait qu’aujourd’hui, alors que s’ouvre l’année 2017, il sévit, sous sa forme financiarisée, sans scrupules sur le monde. Sans ennemi systémique non plus, personne ne le remettant plus fondamentalement en cause, contrairement à il y a cent ans.
Et c’est cette mainmise sans scrupules sur toutes les richesses, faisant que 1% des Hommes possèdent autant que les 99% restants, qui, si elle n’entraîne pas de lutte pour plus de justice, n’en répand pas moins angoisse, fragilité et précarité parmi les gens.
Que faire d’autre alors que d’en revenir au repli sur soi, qu’il soit religieux ou identitaire et, souvent, les deux à la fois? Avec des partis d’extrême droite se frottant les mains, parce que nationalisme et religion sont les deux colonnes de leur fonds de commerce.
2017 promet d’en devenir un pic dangereux, avec, en Europe, des élections en France et en Allemagne pour ne parler que des deux grands ennemis de 1917. Ceci, alors que l’entrée d’un Trump dans la Maison Blanche dans quelques jours, n’augure rien de bon.
Faut-il alors faire le dos rond, quitte à ce que partout les choses s’enveniment? Baisser les bras devant le rouleau compresseur? Enterrer le beau slogan de jadis affirmant qu’un monde meilleur est possible?
Ce serait enfoncer la tête dans le sable, comme l’espèce humaine a si souvent su le faire, ouvrant la voie à sa propre destruction. Car, cette fois-ci, en plus de l’appauvrissement des peuples, en plus de la montée des idées totalitaires, en plus de la fanatisation religieuse et nationaliste, en plus de tout ce qui a fait que le 20e siècle a enfanté deux guerres mondiales, il y va également de la planète.
A force de la dévaster comme nous le faisons aujourd’hui, nous ne saurons même plus, dans cent ans, pousser, comme en cette aube de 2017, notre cri d’alarme, puisque notre existence même, sur Terre, est désormais remise en cause.
Si souhaiter une bonne année à nos lecteurs signifie commencer l’inversion de la courbe, alors oui, que 2017 nous apporte la fin de la dégringolade et le début d’une ère nouvelle.
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