Ce fut un „ouf“ de soulagement dans le camp des démocrates européens lundi soir quand fut connu le résultat de l’élection présidentielle autrichienne. Il est certain que la présidence de la République d’Alexander van der Bellen sied mieux à l’image de l’Autriche que celle du populiste de droite Norbert Hofer.
Mais le résultat, au fil du rasoir, ne peut pas masquer une réalité, celle d’un pays profondément divisé dont la moitié de l’électorat n’a pas hésité à voter pour l’extrême droite.
„La campagne contre la ville, les jeunes chômeurs contre les femmes bien éduquées“, a résumé un analyste.
Les choses sont certainement plus complexes.
Le fait est que les partis traditionnels, à gauche comme à droite, furent hors-jeu dès le premier tour de scrutin et que cette désaffection en dit long sur le sentiment d’échec ambiant. La social-démocratie comme la droite chrétienne ont échoué avec leurs recettes interchangeables, et leurs représentants manquent de ce charisme qui, jadis, caractérisait les Kreisky ou Vranitzky.
L’Autriche, terre contrastée avec ses campagnes si provinciales tel le Burgenland, ou sa capitale, Vienne, si cosmopolite et témoin de la puissance d’un empire évanoui, l’Autriche qui s’est relevée du traumatisme des années 30 et 40, celle qui fut aux premières loges de la Guerre froide avant de voir arraché le rideau de fer avec la Hongrie, est aujourd’hui déstabilisée.
Trop d’immigrants trop vite font qu’elle n’a pas eu le temps d’admettre que ces premiers sont des réfugiés avant tout, des hommes et des femmes qui fuient la guerre et découvriront que dans nos contrées, ce ne sont pas les armes qui tuent, mais la misère, le pouvoir de l’argent, l’égoïsme, la peur de l’autre. Car de l’autre ont peur les trois quarts des électeurs de Hofer.
Il serait erroné de croire que 50% des Autrichiens seraient passés dans le camp de l’extrême droite et devenus arabophobes, islamophobes, isolationnistes. Non, en Autriche comme ici, les gens ont peur du chômage, peur de voir leur pouvoir d’achat se volatiliser, peur des discours d’austérité qui les insécurisent, peur à l’idée d’une perte d’identité souvent plus virtuelle que réelle.
Le problème est que les classes politiques se sont éloignées des citoyens et ne s’imaginent même plus ce qui peut se passer dans la tête de quelqu’un qui doit difficilement boucler ses fins de mois, s’inquiète pour ses enfants, vit dans des rues ou dans des quartiers exposés à toutes sortes de violence.
Or, ce clivage-là ne sera pas dépassé par la simple victoire en quelques milliers de voix d’un Vert sur un Extrême-droite. Ni en Autriche, ni en France, ni en Pologne, ni en Hongrie ou ailleurs.
Réconcilier le citoyen avec la politique, réussir à faire renaître l’estime et le respect du citoyen pour l’homme politique, tel est l’enjeu d’une situation qui s’étend peu à peu dans toute l’Union européenne. Et nulle part, on ne voit surgir de grand homme d’Etat capable de ressouder des populations fractionnées, déstructurées.
Le temps presse. C’est pourquoi l’Europe doit retrouver au plus vite son âme.
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