Artiste anglais né en 1937 à Bradford, Hockney suit les cours du Royal College of Art de Londres. La figuration est la clé de voûte de son art. Fortement influencé par Bacon et Dubuffet, il deviendra peu à peu un artiste hyperréaliste, aux couleurs acidulés, ceci grâce à son arrivée en 1964 en Californie. Il y découvre une certaine façon de vivre, la lumière et les piscines, les polaroids et la peinture acrylique. Grand admirateur de Cézanne, il fait sienne sa façon de voir.
Dans un texte écrit pour cette exposition par le galeriste, écrivain et critique d’art, Jean Frémon, texte pour lequel il s’entretient avec David Hockney, celui-ci, en évoquant Cézanne, dit „qu’il renverse la perspective en recherchant d’abord le ‚point culminant’, celui qui est le plus rapproché de notre œil et à partir duquel les bords de l’objet ou de la figure fuient vers les côtés, créant une sensation de relief et une présence toute nouvelle.“
Hockney retient la leçon pour „Vincent’s Chair and Pipe“ („La chaise et la pipe de Vincent“), (1988, acrylique sur toile). „Je suis convaincu“, continue Hockney lors de cette formidable visite de Jean Frémon dans son atelier en Normandie, où il réside depuis 2019, „que la présence humaine peut être ressentie sans être représentée.“ Il évoque les pommes de Cézanne qui, continue-t-il, „sont fortement empreintes de présence humaine“.
Effectivement, la toile dédiée à Vincent van Gogh est très émouvante, car elle souligne la présence de l’artiste, par cette chaise paillée si familière à nos esprits. Et le point de vue choisi nous fait penser aussi au point de fuite qu’utilisait Van Gogh en faisant filer les parquets des cafés dans ses toiles.
Circuler dans l’œuvre
Parmi les cent-trois œuvres présentées ici, nous retrouvons les plus emblématiques, comme „My Parents“ (1977, huile sur toile) ou „Mr and Mars Clark and Percy“ (1970, acrylique sur toile), qui sont des représentations réalistes, s’attachant à la présence d’êtres dans un huis-clos. Avec minutie, en prêtant attention aux ombres, à la lumière.
Hockney, dans son souci de naturalisme, s’aide d’un appareil-photo. Ses proches, parents ou amis, sont soigneusement mis en scène, dans des poses parfois nonchalantes. La dimension psychologique qui émane de ces toiles provient grandement des attitudes, des regards, du silence – comme un instant figé.
La monumentalité de l’espace représenté nous invite à nous y plonger. Le décor est dépouillé, réduit à l’essentiel, et nous avons parfois la proximité d’un Balthus, par la raideur des personnages, leur façon de nous faire face.
David Hockney a beaucoup dessiné et pratiqué l’art de la gravure. Ainsi illustre-t-il l’œuvre du poète gréco-égyptien Constantin Cavafy, usant de lignes précises, d’un style épuré, pour des amours homosexuelles. Pour mémoire, ces gravures sont publiées en 1967, au moment où le parlement vote une loi légalisant les relations homosexuelles en Angleterre et au Pays de Galles. Comme il dessine ses proches, il en émane, même si Hockney dit ne pas s’en préoccuper, une ressemblance, provenant de la relation elle-même, d’une connaissance instinctive.
Répétons-le, le point de fuite universel, enseigné par Brunelleschi en 1420, nous amène à considérer l’espace selon un angle, toujours le même. Alors que les Chinois ou les Japonais déploient la peinture autrement. La perspective unique réduit considérablement la portée de l’image.
David Hockney fera de cette problématique son cheval de bataille. Par l’usage de la perspective inversée et la représentation simultanée de plusieurs points de vue, il explore les diverses réalités de l’espace en trois dimensions, et donne au spectateur la sensation de circuler dans l’œuvre, notamment ses paysages. „The Perspective Lesson“ (1984, lithographie sur papier) lui permet à la fois de représenter des espaces extérieurs et intérieurs en synthétisant les points de vue sur une même image.
Pour David Hockney, la nouvelle création ne peut apparaître que sur de nouveaux supports. Les nouvelles technologies l’attirent, et il se met à utiliser l’ordinateur, l’imprimante, l’iPad. Tout en gardant ses convictions à propos des multiples points de vue. „L’œil est toujours en mouvement“, écrit David Hockney; „s’il ne bouge pas, c’est que vous êtes mort. (…) dans la vie réelle, quand vous êtes cinq personnes à regarder, il y a un millier de perspectives.“
„In the Studio“ (décembre 2017, dessin photographique imprimé sur sept feuilles de papier) est un autoportrait de l’artiste dans son atelier. On y voit David Hockney entouré d’œuvres anciennes et récentes, cet autoportrait étant le résultat de 3.000 photographies numériques assemblées en un dessin photographique. Ainsi la peinture part-elle à la recherche d’autres territoires.
Info
David Hockney, Collection de la Tate
Jusqu’au 28 mai 2023
Musée Granet
Place Saint-Jean de Malte
Aix-en-Provence
museegranet-aixenprovence.fr
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