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ForumUne profonde gratitude: Un hommage à la regrettée Anise Koltz

Forum / Une profonde gratitude: Un hommage à la regrettée Anise Koltz
 Photo: Editpress/Alain Rischard

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Le 11 mars 2023, les funérailles de la regrettée poétesse Anise Koltz ont eu lieu en l’église de Junglinster (Luxembourg) en présence du maréchal de la Cour, du Ministre d’État honoraire M. Jean-Claude Juncker, Président (2014-19) de la Commission européenne et Médaille d’or de la Renaissance française, de la ministre de la Culture Mme Sam Tanson et de Mme Lydie Polfer, bourgmestre de Luxembourg et Médaille d’or de la Renaissance française, ainsi que de nombreuses autres personnalités.

La poésie d’Anise Koltz a été largement récompensée par de nombreux prix littéraires, dont le Goncourt de la poésie Robert Sabatier en 2018. Lorsqu’elle a reçu ce prix prestigieux à l’âge de 90 ans, elle a déclaré: „Cela va me motiver pour essayer d’écrire de mieux en mieux.“ Son anthologie „Somnambules du jour“ a fait d’elle le premier auteur luxembourgeois à être imprimé par l’éditeur français Gallimard, dans la collection „Poésie“, en 2016.

Née en 1928 au Luxembourg, Anise a été scolarisée en allemand pendant l’occupation nazie. Elle a commencé à écrire très jeune: „L’écriture m’aide à trier, à analyser. L’écriture est ma vie.“

En créant avec son mari les „Rencontres littéraires de Mondorf“ en 1962, Anise Koltz a relancé l’initiative du cercle littéraire de sa tante Mayrisch à Colpach, visant à susciter par des échanges entre auteurs la fraternité franco-allemande. Elle a participé à de nombreuses autres rencontres littéraires, dont on soulignera celle du „Printemps des Poètes“ qui a étendu cette fraternité à une diversité toujours plus grande de cultures.

Après la mort de son mari en 1971 des suites de blessures et de maladies liées à la guerre, la langue française est devenue sa „patrie spirituelle“ et Anise a commencé à écrire uniquement en français. Son investissement persévérant dans cette langue d’adoption a été récompensé par de nombreux prix et distinctions. Elle a notamment reçu le prix de l’Académie belge en 1994, le prix luxembourgeois Servais en 1998 et le prix français de poésie Jean Arp en 2008.

Anise Koltz a pris part à plusieurs visites d’État du Grand-Duc de Luxembourg et a participé aux travaux d’académies littéraires, comme l’Académie Mallarmé, ainsi qu’à la fondation de l’Académie européenne de poésie Alain Bosquet.

La vie d’Anise Koltz semble avoir été à l’image de ses „maîtres“:

„Ce sont les arbres qui ont été mes maîtres. Quand ils sont petits, ils sont au même niveau que les plantes. Puis, en grandissant, ils deviennent plus solides. Ils sont un exemple. Ils sont pleins de dignité et ils meurent debout si on ne les coupe pas.“

Dans sa maison, Anise était entourée à l’extérieur par la beauté de grands arbres et à l’intérieur par celle des œuvres d’art qu’elle collectionnait de retour de ses voyages en Égypte, en Amérique du Sud, en Asie du Sud et au Japon, ainsi que par celle des sublimes photos qu’elle prenait de sa famille et de ses amis. En 2013, à l’occasion de l’exposition des calligraphies de Tairiku Teshima en dialogue avec la création et la poésie luxembourgeoises, organisée par la délégation luxembourgeoise auprès de l’Unesco, en partenariat avec l’International Art Foundation, le „Printemps des Poètes Luxembourg“ et son président M. Bruno Théret, ainsi qu’en coopération avec la délégation du Japon auprès de l’Unesco et d’autres prestigieuses institutions, elle a reçu la Médaille d’or de la Renaissance française des valeurs francophones, en même temps que le calligraphe Tairiku Teshima recevait la Médaille d’or du rayonnement culturel de la Renaissance française. Mme Irina Bokova, Directrice générale de l’UNESCO, a indiqué que l’originalité de cette initiative „réside dans la promotion de la rencontre des arts à travers une diversité de cultures et de disciplines“. Mme Bokova, en soulignant que „tout ce qui nous élève nous rassemble“, a relevé „l’importance de cet événement pour la décennie des Nations Unies pour le rapprochement des cultures et pour stimuler notre créativité“.

Dans son recueil intitulé „Somnambules du jour“, Anise Koltz nous dit que „Le poète traîne chaque mot devant un tribunal pour en vérifier la transcendance“. C’est probablement de cette approche que prend forme chez elle une poésie faite de mots tranchants, mais pourtant d’une expression douce et pleine de rondeur, comme la rose ‚Jardins d’Ansembourg’, avec ses épines, son subtil parfum d’anis, ses pétales ivoire, turbinés et finement teintés de rose, qu’elle a inaugurée en tant que sa marraine (M. Teshima étant son parrain), au Grand-Château d’Ansembourg, en présence de dix-sept ambassadeurs ou leurs représentants, venus chacun planter un rosier à l’occasion de la Journée internationale de la Paix 2017.

Tout au long de sa vie et de son travail persévérant de poète, Anise Koltz se sera attachée à „puiser dans les racines du Grand Tout“, afin d’ „atteindre la semence des choses“ et „raviver la dimension symbolique et l’aura de chaque mot“.

„Dans notre monde intérieur, nous sommes libres. Il n’y a pas de contraintes ni d’obstacles.“

Par ces mots qu’on trouve dans son anthologie Gallimard, nous pouvons sentir d’où vient la source de son élégance, son sens de la liberté, mais aussi de la justice. Sa profonde compassion l’a conduite à embrasser les causes humanitaires de ses prochains en détresse, entre autres par ses vibrantes lettres d’appels aux dons pour soutenir le peuple grec après la crise financière de 2008.

„Aucune légende ne m’appartient.

Personne n’achèvera mon histoire.“

Au lieu de cela, chère Anise, avant de vous rejoindre dans le monde de l’effacement, nous lirons votre poésie à nouveau.

Vous continuerez à nous accompagner doucement, comme „main dans la main“, par l’amour qui parle dans „les galaxies intérieures“ de vos poèmes.

Votre poésie nous invite à nous investir ici et maintenant dans notre époque, en nous évertuant d’abord à polir notre for intérieur, cet amont invisible où se sécrète la sève qui clarifie notre vue, renforce la vigueur de nos mots et revivifie notre désir d’œuvrer pour un avenir meilleur.

Veuillez, chère et regrettée Anise, accepter l’hommage de notre profonde gratitude.

* Christophe Déage a rédigé cet hommage au nom la Délégation du Luxembourg de La Renaissance française

Christophe Déage
Christophe Déage Photo: Archive Editpress