Né à Venise vers 1435, Giovanni Bellini est le fils illégitime de Jacopo Bellini, peintre connu pour travailler dans le style gothique international, caractérisé notamment par des figures allongées, une perspective marquée et une représentation minutieuse de la nature.
Giovanni Bellini est élevé dans la famille et son demi-frère n’est autre que le célèbre peintre Gentile Bellini. Giovanni Bellini travaille dans l’atelier familial et intègre les nouveautés venues de Florence, marquées davantage par le dessin. Giovanni Bellini est un peintre curieux de la manière des autres maîtres, intégrant leurs techniques pour mieux s’en affranchir.
Ainsi au départ subira-t-il les influences de son père, de son frère, mais aussi de son beau-frère, le célèbre Mantegna. De celui-ci, il adopte le classicisme et les formes monumentales. Il donne davantage d’ampleur à ses œuvres, en étudiant notamment les sculptures de Donatello. On le voit, les influences s’entrecroisent, Giovanni Bellini ne s’en cache pas, et c’est avec minutie qu’il apprend pour s’émanciper et trouver par de multiples compagnonnages ce qui fera sa marque. Il ouvrira la voie à l’école vénitienne, dont Titien est le maître incontesté.
Un souci de précision et de nuances
Le départ de Mantegna, en 1460, pour Mantoue, où il est nommé peintre officiel de la cour, permet à Giovanni Bellini de s’affirmer davantage. Il voyage peu, mais Venise est à la croisée des chemins, avec de multiples influences, byzantines, musulmanes, flamandes, elle est la plaque tournante du commerce international et de l’art. Ainsi l’arrivée en 1745 d’Antonello de Messine (1430-1479), peintre sicilien et grand voyageur, lui-même influencé par la peinture flamande, lui fait découvrir le sens du détail, les paysages en arrière-plan, la perspective atmosphérique. Les paysages dont il pare les arrière-plans deviennent topographiques et précis. Giovanni Bellini emprunte également à l’art flamand la peinture à l’huile, dans un souci de précision et de nuances.
Giovanni Bellini se spécialise dans la production de Madones pour des commanditaires privés. Lorsque Constantinople tombe aux mains des Ottomans, des réfugiés trouvent asile à Venise, amenant nombre d’icônes et de manuscrits.
Giovanni Bellini s’en inspire et ses Madones apparaissent sur fond d’or, dans une iconographie simplifiée. Dans les décors des frères Bellini figureront en outre des influences musulmanes. Giovanni Bellini, connu pour ses Vierges à l’enfant, effectue une transition remarquable avec „Sainte Justine“ (1475, détrempe sur bois). Intense lumière, délicatesse des traits, émotion au lieu de la froideur et de la distance, couleurs intenses, deviennent des caractéristiques de son style.
Giovanni Bellini rompt avec les représentations du Christ de douleur et opte pour un cadrage plus resserré, afin de créer une interaction avec le spectateur. L’émotion et la compassion sont au rendez-vous, suscitant un lien puissant entre les fidèles et les figures sacrées. La douceur se retrouve également grâce à la vision atmosphérique que Bellini affine. En écho au sfumato de Léonard de Vinci les jeunes artistes, dans son atelier, délaissent la netteté du dessin pour l’impression, la liberté de la touche et de la couleur, ainsi en est-il de Giorgione et du Titien … travail que Bellini intègrera à son œuvre.
Giovanni Bellini jouit d’une renommée internationale et l’un de ses derniers tableaux, peint à l’âge de 80 ans, „La Dérision de Noé“ (vers 1513-1515, huile sur toile) est perçue par l’historien de l’art Roberto Longhi comme le premier tableau de la peinture moderne.
Loin de voir un Noé triomphant sur son Arche, Giovanni Bellini le représente nu et endormi, moqué par l’un de ses fils. Cette scène de l’Ancien Testament fait suite au Déluge. On peut le voir également comme une ultime confession, car selon la Bible, même l’homme le plus pur est voué au péché. Composition en hémicycle, où la couleur règne désormais sur la ligne. Cette couleur dont Titien s’empare pour s’imposer, à la mort de Giovanni Bellini, en 1516, comme peintre officiel de Venise. C’est ainsi que les leçons de Bellini s’imposeront dans l’Europe entière.
Info
Giovanni Bellini, influences croisées
Jusqu’au 17 juillet 2023
Musée Jacquemart-André
158, boulevard Haussmann
75008 Paris
www.musee-jacquemart-andre.com
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