Il n’y a guère plus d’un an, lors de la campagne pour le renouvellement de l’Assemblée suivant la réélection d’Emmanuel Macron, la gauche s’accordait pour surmonter ses divergences idéologiques: les Verts, le PS, le PCF et La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon s’unissaient sous la bannière de ce dernier. Avec un résultat encourageant: chacun de ces partis allait obtenir assez de députés pour pouvoir constituer son propre groupe, non sans former aussi un vaste intergroupe, celui de la Nupes. S’ajoutant à une nouvelle avancée de l’extrême droite et à un revers des macronistes, cette démarche privait la majorité présidentielle de majorité parlementaire.
Pourquoi, alors, ces retrouvailles ont-elles été si tendues, en tout cas trop maussades pour avoir donné le départ à une nouvelle offensive commune? „Pour dessiner les contours d’une gauche qui gagne, il faut beaucoup d’écoute, de dialogue direct entre les gauches, les écologistes et des citoyens engagés“, assuraient les organisateurs. Le dialogue aura été direct, en effet; mais il devait mettre davantage en lumière des divergences, certaines graves, que l’envie de continuer à faire route ensemble.
Au chapitre de la franchise navrée, on aura ainsi entendu des militant(e)s apostropher ainsi les ténors des partis de gauche présents sur scène: „Vous nous écoutez, mais vous ne nous entendez pas“; „La justice sociale que vous proposez ne fait pas rêver“; „Vous, les élus, êtes très loin de nos projets, de nos envies, de nos convictions.“ Mais c’est sans doute davantage encore entre les formations composant la Nupes que les divergences vont croissant. Avec une focalisation particulière sur les propos et les méthodes du chef de LFI, que celui des communistes, Fabien Roussel, semble avoir de plus en plus de mal à supporter.
Des critiques virulentes
Ce dernier avait déjà dénoncé le fait que, seul leader de toute la classe politique française, M. Mélenchon s’était refusé à condamner les émeutes et leur cortège de destruction de biens publics; le secrétaire national du PCF a rajouté depuis qu’il appelait de ses vœux „une gauche qui ne cède rien aux valeurs de notre République, qui défend la justice, mais aussi l’ordre et la sécurité“. Avant d’ajouter: „Cette gauche n’est pas celle que représente aujourd’hui La France insoumise“.
Sans être aussi catégorique, le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a lui aussi condamné le soutien aux émeutiers affiché par le dirigeant de LFI. Pour lui, „le moment actuel est un moment de profond désaccord“, car „si le point de départ des émeutes est une colère qu’il faut entendre, et à laquelle il faut donner une réponse, on ne peut pas donner le sentiment d’encourager et d’accepter la violence“. Et les positions de Jean-Luc Mélenchon commencent aussi, sinon à fracturer, du moins à fissurer son propre parti.
Une dernière circonstance a achevé de compliquer les relations internes à la Nupes. En ces lendemains d’émeutes, le gouvernement avait interdit la marche annuelle d’hommage à la mémoire d’Adama Traoré, mort dans une maison d’arrêt du Val-d’Oise en juillet 2016 dans des circonstances peu claires. Les organisateurs ont décidé d’organiser tout de même cette manifestation à Paris le lendemain; aussitôt interdite également, mais plusieurs élus de la Nupes y ont pris part, ceint de leur écharpe tricolore. Dont le président LFI de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, Eric Coquerel, cependant que l’assistance scandait un des slogans favoris de l’ultra-gauche: „Tout le monde déteste la police“.
Malaise supplémentaire … mais certainement pas final.
"Méchantloup"- voilà le bon terme. Le destructeur en pleine forme.