Au cours d’une cinquième nuit de violences urbaines, des émeutiers ont défoncé le portail du domicile de Vincent Jeanbrun, maire de L’Haÿ-les-Roses, dans la périphérie sud de Paris, à l’aide d’une voiture préalablement incendiée, selon un procureur chargé de l’enquête ouverte pour „tentative d’assassinat“. La femme de cet élu de droite lui-même absent, et l’un de ses deux jeunes enfants ont été blessés en fuyant la maison, a rapporté M. Jeanbrun, pour qui „un cap a été franchi dans l’horreur et l’ignominie“.
A l’unisson de la classe politique, la Première ministre Elisabeth Borne s’est élevée contre des „faits intolérables“. Le gouvernement ne „laissera passer aucune violence“, a-t-elle assuré sur place dimanche après-midi, promettant „la plus grande fermeté“ dans les sanctions. Un appel aux élus et aux citoyens à se rassembler lundi à 12 h 00 devant les mairies de tout le pays a par ailleurs été lancé par le président de l’Association des maires de France (AMF), David Lisnard, dans un contexte de recrudescence des attaques contre des élus avec „150 mairies ou bâtiments municipaux attaqués depuis mardi”, selon lui.
Confiance en la justice
Au total, le ministère de l’Intérieur a recensé dix commissariats, dix casernes de gendarmerie et six postes de police municipale visés dans la nuit de samedi à dimanche. Quelque 719 personnes ont été interpelées, notamment pour port d’objets susceptibles de servir d’armes ou de projectiles.
„Arrêtez, ne cassez pas“, a lancé dimanche à l’intention des émeutiers Nadia, la grand-mère de Nahel, au lendemain de l’inhumation de l’adolescent dans le recueillement à Nanterre, près de Paris, où il est décédé. „Qu’ils ne cassent pas les vitrines, qu’ils ne cassent pas les écoles, pas les bus“, a-t-elle dit sur la chaîne BFMTV, „c’est des mamans qui prennent les bus“.
Pour tenter d’enrayer la spirale de violence, de nombreuses communes françaises ont instauré un couvre-feu et les réseaux de transport en commun ont été fermés plus tôt que prévu, notamment celui des bus et tramways en région parisienne à partir de 21 h 00. „J’en veux aux deux policiers (…) qui ont donné deux coups de crosse à la tête de mon petit-fils, et à celui qui a tiré directement dans le cœur, il pouvait lui tirer dans la jambe, dans le bras“, a encore dit la grand-mère de Nahel, disant avoir „confiance en la justice“.
Une vidéo amateur est venue contredire le récit initial livré par les policiers du tir à bout portant qui a entraîné la mort de l’adolescent, dont l’auteur présumé, âgé de 38 ans, a été arrêté et inculpé d’homicide volontaire.
Inquiétude à l’étranger
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a reconduit dimanche le dispositif de maintien de l’ordre avec, pour la troisième nuit consécutive, 45.000 policiers et gendarmes mobilisés. La nuit de samedi à dimanche a été „plus calme grâce à l’action résolue des forces de l’ordre“, avait assuré le ministre dans la matinée, en comparaison de la précédente, marquée par plus de 1.300 interpellations, un record depuis mardi.
Parmi ces effectifs, 7.000 sont déployés à Paris et en proche périphérie, outre des renforts conséquents à Marseille et Lyon, les principales agglomérations touchées la veille par les heurts, destructions ou pillages. Un total de 577 véhicules et 74 bâtiments ont néanmoins été incendiés, et 45 policiers et gendarmes ont été blessés, selon le ministère de l’Intérieur.
À Marseille, sur la Canebière, artère phare de la deuxième ville de France, d’importants effectifs de forces de l’ordre sont parvenus à disperser les groupes de jeunes qui avaient semé le chaos la veille, ont constaté des journalistes de l’AFP. À Paris, un important dispositif a été déployé le long des Champs-Elysées, où des appels à se rassembler circulaient depuis vendredi sur les réseaux sociaux, selon une journaliste de l’AFP. Cet embrasement inquiète à l’étranger, d’autant plus que la France doit accueillir à l’automne la Coupe du monde de rugby, puis les Jeux olympiques à l’été 2024. Dans ce climat, M. Macron a reporté sa visite d’Etat en Allemagne prévue de dimanche soir à mardi.
Le chancelier allemand Olaf Scholz s’est dit dimanche „préoccupé”, compte tenu de l’importance du couple franco-allemand pour le fonctionnement de l’Union européenne, tout en se disant „persuadé“ que le président français trouverait les moyens de sortir „rapidement“ de la crise. La vague de violences et la colère de nombreux jeunes habitants des quartiers populaires contre la police ou l’Etat rappellent les émeutes qui avaient secoué la France en 2005, après la mort de deux adolescents poursuivis par la police. (AFP)
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