„Von der schönen Erde“ von Tomas Bjørnstad
Nach vier Jahren wurde das Geheimnis endlich gelüftet: Während eines spannend inszenierten und schelmischen Leseabends im CNL erhielten Luxemburgensia-Kenner die Bestätigung dessen, was sie sich spätestens nach Bjørnstads zweitem Buch „Die Tanzenden“ denken konnten – dass sich hinter dem postmodernen Vexierspiel rund um den mysteriösen pseudo-norwegischen Autor Tomas Bjørnstad niemand anders als Nico Helminger versteckt.
Toll an der Auflösung dieses literarischen Whodunnits ist, dass nun endlich über den Inhalt des Werkes dieses Helminger-Heteronyms geredet werden kann: In „Von der schönen Erde“ spielt Helminger ähnlich wie ein Fernando Pessoa oder ein Antoine Volodine mit dem Begriff der Autoren-Persona, lädt den Leser auf eine Schnitzeljagd ein, die sich in ihrer Gestaltung vor dem postmodernen Meister Julio Cortázar verbeugt, bricht mit narrativer Linearität, indem er mindestens drei Leseparcours durch den neoliberalen urbanen Albtraum von Bjørnstadt – eine Art Replika von Esch-sur-Alzette in der Hölle des Kapitals – vorschlägt, multipliziert Perspektiven, Handlungsstränge, literarische Formen und entführt die Leser*innen in eine fiktionale Welt, in der jeder dystopische Moment – Firmen, die ihre Mitarbeiter in den Freitod drängen, eine totgewirtschaftete Scheinkulturhauptstadt – einer nur leicht hyperbolischen Wirklichkeitsdarstellung entspricht, sodass einem bei allem Humor das Lachen irgendwann im Hals stecken bleibt.
Ganz gleich, ob der Autor irrelevant, tot oder nur eine Fiktion ist: Helminger und Bjørnstad strafen Proust, Barthes und die ganzen Poststrukturalisten Lügen und zünden dabei gleich so viele Feuerwerke an Ideen, dass man damit die Kulturhauptstadt im Süden hätte abschließen können – hätte diese dann auch etwas mit Kultur am Hut gehabt. (Jeff Schinker)
„L’homme peuplé“ de Franck Bouysse
Harry a besoin de se retrouver avant d’écrire un deuxième roman. Sur un coup de tête, il achète une maison délabrée. Des objets y sont mystérieusement abandonnés. C’est l’hiver, dans la campagne profonde. Il y a la neige. Il y a une atmosphère fantasmagorique. En face, dans une autre ferme, Caleb guérit uniquement les animaux. Deux solitudes s’épient à distance. Le brouillard épais n’efface pas tout. Avec le silence, on entend: „des bruits sourds dans la maison.“ Mal à l’aise, Harry tente de trouer les peurs qui s’installent. Peuplé de personnages imaginaires ou réels, il s’interroge sur le processus d’écriture, entre doutes et emportements. Les amateurs de thrillers littéraires ne seront pas déçus.
Ici, Franck Bouysse sonde les tourments de l’écriture, piste la quête de la phrase qu’on voudrait écrire. La puissance narrative de l’intrigue renforce les dialogues assez courts. On ne s’étonnera pas de croiser la nature et ses secrets si chers à l’auteur et que la littérature vient sauver de l’oubli. (Corinne Le Brun)
„Le mage du Kremlin“ de Giuliano Da Empoli
Retraçant la montée au pouvoir de Poutine à travers le récit de vie de Vadim Baranov, contrepartie fictionnelle de Vladislav Sourkov, le conseiller de celui que tous appellent le tsar et qui sera pour toujours le visage tyrannique de l’invasion russe de l’Ukraine et de la déchéance mondiale et probablement définitive de la Russie, „Le Mage du Kremlin“ est non seulement une biographie fictionnelle qui raconte avec brio la lente métamorphose d’un metteur en scène en herbe qui, par amour pour la mise en scène et la fiction, sacrifie ses aspirations artistiques à la manipulation de toute une nation – c’est, surtout, un portrait acerbe et intelligent de la Russie contemporaine, Da Empoli réussissant à enchevêtrer le destin personnel romancé de Baranov dans le récit d’une nation qui, depuis la chute de l’Union soviétique à son ouverture au capitalisme sauvage en passant par les humiliations politiques sous le régime de leaders mous et alcoolos, a vu Poutine comme un messie qui la réhabiliterait – si la Russie de Da Empoli était un être humain, elle serait très certainement un homme toxique, viril, à la fierté bafouée.
Là où „Z comme zombie“, récent essai de Iegor Gran qui essaie d’expliquer la folie guerrière de la Russie et l’incompréhensible soutien à la guerre d’une partie de son intelligentsia, s’enfonce parfois trop dans ses dichotomies, Da Empoli réussit à enchâsser sa fine analyse dans une sorte de Bildungsroman qui propose de surcroît parmi les pages les plus intelligentes sur les rouages et mécanismes du pouvoir depuis le Prince de Machiavel. (Jeff Schinker)
„Les Bienheureux“ de Julien Dufresnes-Lamy
Julien Dufresne-Lamy raconte neuf enfants et la maladie Williams-Beurens. Ils ne pourront jamais lire. Ecrire. Dessiner. Compter. Leur taille restera petite. Mais ils auront l’oreille absolue, ils aimeront les gens. Ils offriront leur amour, leur soutien, sans compter. Sans l’autre on n’est rien, ces enfants Williams l’ont parfaitement compris. Julien Dufresne-Lamy découvre des talents, des „différences“ merveilleuses voire magiques. Il regarde. Ecoute. Fait partager cette humanité au-dessus de nous, sans sombrer dans le pathos. L’écriture intense épouse des mots, des gestes. Tendres et joyeux, Marius, Thomas, Maléna, Lauriane, Enzo, Romain, Axelle, Marie et Arthur sont enveloppés d’amour par des parents extraordinairement humains malgré le quotidien qui n’est pas facile. En racontant leur plus grand effondrement, ils ont d’abord pensé à leur enfant qui va devenir un personnage de roman. Ces familles sont lumineuses car elles ont des enfants tellement solaires que cela les contamine. Une leçon d’humanité que de lire ce récit dense et vrai. (Corinne Le Brun)
„The Trees“ by Percival Everett
Many things wicked this way come: In Money, Mississippi – a run-down town crowded with racist hillbillies even dumber than the characters in the Coen-Brothers-cult-movie „Fargo“ – one or several serial killers take revenge by slowly killing all the members of a family of losers whose matriarch and grandmother has been co-responsible for the real-life-murder of 14-year-old Emmett Till, who was lynched in 1955. Creepily enough, next to each White corpse lies the dead body of a Black man – a body that seems to disappear as quickly as it has appeared.
„The Trees“ reads as if Jordan Peele, Quentin Tarantino and Spike Lee had joined forces and written a poignant novel about US-American racism and colonialism. Featuring a duo of bad-ass cops and the best dialogue written in ages, what starts off as a funny „whodunnit“ quickly turns into a more political and acerbic version of Henry James’ „The Turn of the Screw“, only to end on something like a zombie-apocalypse with an angry mob wanting to take down every White racist in America (considering how many of them exist, you can easily imagine the massacre looming at the end of the novel).
Even though many a movie has ruined its novelistic hypotext: with the right director(s), a future adaptation of „The Trees“ could be as funny as Jarmusch had wanted his disappointing “The Dead Don’t Die” to be, as cool as an all-Black-version of Tarantino’s „Pulp Fiction“ and as angry as Spike Lee’s edulcorated „BlacKkKlansman“ should have been. (Jeff Schinker)
„Cocoaïans“ de Gauz’
Dans la collection „Des écrits pour la parole“, créée il y a quelques années au sein de la maison d’édition de théâtre L’Arche, et où sont publiés tout un ensemble de textes hybrides, qui mêlent théâtre, poésie, spoken word, essai, narrations d’auteur.rice.s internationaux.ales, est sorti cet été un puissant texte de l’artiste ivoirien Gauz’ intitulé „Cocoaïans“. Gauz’, connu pour les trois romans qu’il a publié aux éditions Le Nouvel Attila, notamment „Camarade Papa“ (2018), qui a reçu le Grand prix littéraire d’Afrique noire, est un artiste pluridisciplinaire, à la fois auteur, scénariste, réalisateur et photographe.
Cocoaïans, composé d’un ensemble de tableaux théâtraux qui vont du début du 20e siècle jusque dans un futur proche, en 2031, peignent une fresque historique de la politique du commerce du cacao, et, par-là même, raconte l’histoire des rapports de domination imposés par l’Occident aux pays producteurs d’Afrique. Parce qu’il faut savoir que la Côte d’Ivoire est le premier pays producteur de cacao au monde, mais ne reçoit que 4 pour cent de la valeur annuelle de l’industrie du chocolat, estimée à 100 milliards de dollars. Des millions de cultivateurs de cacao en Côte d’Ivoire survivent moins d’un dollar par jour.
Gauz’ raconte ici, avec beaucoup de verve, mais aussi d’humour, le projet d’émancipation des Cocoaïans, les habitants du pays du cacao, pour fabriquer et vendre eux-mêmes sur les marchés internationaux leur chocolat. C’est un récit de conquête de liberté. (Ian De Toffoli)
„anéantir“ de Michel Houellebecq
En début d’année, le plus inspiré des misanthropes et le plus intelligent des provocateurs de la littérature française revint avec un roman-somme de plus de 700 pages qui fut loin de faire l’unanimité: décrié par certains comme réactionnaire, Michel Houellebecq s’y adonne à nouveau à cette légère extrapolation qui caractérise (presque) l’ensemble de sa production romanesque. Situé en amont des élections françaises en 2027, „anéantir“ tourne autour du quotidien de Paul Raison, qui prépare la campagne électorale de Bruno Juge, futur favori d’élections qui se passent dans un climat anxiogène d’attentats terroristes. Alors que dans „Sérotonine“, il avait pour ainsi dire prédit les grèves des paysans, Houellebecq se penche ici sur le traitement désastreux des gens âgés dans les EHPAD – et cela quelques mois avant que la publication des Fossoyeurs de Victor Castanet créent le scandale en France.
Alors, il y a certainement des pages de trop dans ce roman qui, comme quasiment tous les romans qui font plus de 600 pages, aurait mérité d’être élagué et la provocation qui consiste à faire d’un électeur RN un personnage d’adjuvant plus ou moins intelligent et d’une journaliste gauchiste la connasse du roman s’apparente plus ou moins à des réflexes d’enfant terrible en pilotage automatique. Mais au-delà d’un roman qui développe une vraie vision du monde politique français, „anéantir“ est surtout un terrible et saisissant roman sur la mortalité qui, dans ses cent dernières pages, laisse tomber tous les masques – celui du provocateur, celui du misanthrope, celui du l’enfant terrible – pour écrire les plus désarmantes, les plus sobres et les plus tristes pages sur la fin qui nous attend tous. (Jeff Schinker)
„Un fou“ de Leslie Kaplan
Il est des éditeurs en France qui ont le courage de publier de très courts livres, micro-fictions, brefs récits, essais narratifs ou autres genres qui résistent tant bien que mal à l’hégémonie (commerciale aussi) du genre-royal qu’est le roman (dont on peut aujourd’hui se demander ce qu’il lui reste de royal, tant il est régulièrement malmené), et P.O.L est certainement de ceux-là. Une des dernières pépites à découvrir dans le catalogue de la maison d’édition, est le court récit „Un fou“.
Ce texte raconte la rencontre d’une narratrice et de son petit-fils Hélio avec Simon, un jeune homme de 19 ans qui dit de lui-même qu’il est fou. Peu après, Simon et la narratrice se revoient et il lui confie qu’il a un grand projet, sans lui dire lequel. Le lendemain, la narratrice apprend le président de la République fait des visites surprises dans un collège de Seine-Saint-Denis, dans un lycée, à la Sorbonne, où, coiffé d’un béret basque, il déverse des platitudes politiques. L’Elysée s’en mêle, dénonce une imposture, puis tout un mouvement se met en place dans le pays, et d’autres citoyens prennent la relève et font entendre leurs revendications, jusqu’aux enfants qui recouvrent les murs du formidable graffitis: „Cantine = nul“. Puis commence la répression … Un livre drôle, mélancolique et très touchant sur le vide de la parole politique actuelle et sur le désir d’insurrection de notre époque. (Ian de Toffoli)
„The Seven Moons of Maali Almeida“ by Shehan Karunatilaka
Imagine waking up in a bizarre realm where everybody tells you you’ve just been murdered and have seven moons – speak: days – to discover who killed you, make up for all the wrongs you inflicted on the two people that really loved you and decide whether to enter the void or to linger on in the bardo in order to await your assassins. Imagine having to adapt to the strange rules of this unconventional afterlife, whose social hierarchies you have to adapt to, where ghouls are after your soul and where you can eavesdrop on everyone who, in the world of the living, mentions your name.
No, this is not, as main character Maali Almeida initially thinks, just a weird trip he can’t get out of after he popped the wrong (amount of) pills with his best friend Jaki – this is the real fictional world of Shehan Karunatilaka’s witty, funny and gruesome tale about a closeted gay, war photographer and gambling addict who, in the savage world of Sri Lanka in the 80s, happens to be at the right moment in all the right places to take the most career-damaging photographs for any politician involved in the corrupt, postcolonial, murderous entanglement of the country’s political situation.
Both crudely realistic in its depiction of the warmongering and eerily surreal in its way of transcending, this in an epic afterlife-odysseys, Booker-Prize-winning „The Seven Moons of Maali Almeida“ has more quoteworthy sentences than many an author produces in his or her lifetime – and is both a touching story about regret and a harsh political manifesto against the capital sins of neoliberalism. (Jeff Schinker)
„GPS“ de Lucie Rico
Ariane, une journaliste au chômage, vit comme une recluse jusqu’au jour où sa meilleure amie Sandrine la force à sortir pour fêter ses fiançailles. Comme elle a du mal à trouver l’endroit où se déroulent les festivités, Sandrine partage sa localisation avec elle. Le lendemain, la future mariée a disparu – reste ce point rouge qui gigote, bouge, se déplace, tremble, Sandrine ayant oublié (ou n’ayant pas eu l’occasion) d’éteindre sa géolocalisation. Quand Ariane découvre qu’un joggeur a découvert un cadavre près du Lac de Der, où Ariane et Sandrine se sont connues et où le point sur Google Maps s’attarde puis se déplace, embarquant Ariane dans une folle odyssée sur les traces de leur amitié passée, la journaliste se laisse emporter – sans savoir si ce point, c’est le fantôme de Sandrine, un simple bug, une hallucination émanant de son cerveau de confinée ou son amie qui avait simplement besoin de fuguer.
Jouant pendant longtemps, comme Emmanuel Carrère dans „La moustache“ ou Thomas Pynchon dans „The Crying of Lot 49“, sur cette indécidabilité entre les différentes hypothèse, „GPS“ est à la fois un thriller haletant, une exploration des mondes virtuels qui nous habitent au moins autant que nous les habitons, une récit sur l’aliénation que du monde du travail, un roman sur le lent effondrement des frontières entre réel et virtuel – et un belle et triste réflexion sur le deuil. (Jeff Schinker)
„Fluides Herz“ von Tom Weber
In Tom Webers Lyrikband „Fluides Herz“ tritt der spätmoderne Mensch als ein flüchtigtes, flüssiges Wesen auf, das durch den Wechsel von geistig-physischen Aggregatzuständen den Weg zur inneren Freiheit und spirituellen Transzendenz findet. Zu weltentrückt? Aber nein, keine Sorge: Nach seiner Erleuchtung bleibt das Ich, das in Webers Texten das Wort ergreift, mit den Füßen auf dem Boden und seine Sprache nahbar, unaufgeregt, pfiffig-ironisch – alles easy also: „den tod fürchte ich / nicht mehr seitdem ich / mir vor kurzem die / behind the scenes mal / reingezogen hab“. Reinziehen sollte man sich den Gedichtband auf jeden Fall, denn im Strom der diesjährigen Neuerscheinungen blitzt „Fluides Herz“ als wahrer Hochkaräter auf. Ein Fang, der sich lohnt. (Chris Lauer)
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