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Art minimal au MudamRobert Morris: Le corps perceptif

Art minimal au Mudam / Robert Morris: Le corps perceptif
Robert Morris, „Untitled (Scatter Piece)“, 1968-1969/2009. Feutre de laine pressé, acier, acier plaqué zinc, acier revêtu, plomb, aluminium, laiton, les dimensions varient avec l'installation. Collection The Art Institute of Chicago. Photo: © 2020 The Estate of Robert Morris/Artists Rights Society (ARS), New York

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C’est une plongée dans les années 60, le minimalisme et sa radicalité. Pour la cause, l’exposition ne s’offre pas de suite. Mais ne pas être simple d’accès ne l’empêche pas d’être ludique. Le plaisir de l’artiste Morris, aussi réputé que pionnier, est communicatif. Clés de lecture.

L’époque est celle des matériaux industriels, induisant de nouvelles façons de les exploiter. Des façons en tout cas autres que celles de la sculpture traditionnelle. Avec des enjeux autres, qui ne sont pas d’abord esthétiques.

Dans ce propos global, la grande nouveauté de l’artiste américain Robert Morris (1931-2018), sculpteur, mais pas que (loin s’en faut), „figure fondamentale dans l’histoire de l’art minimal, post-minimal et conceptuel“, contributeur aussi au développement des notions d’art performance et de Land Art, la grande nouveauté, dis-je, „c’est que ce qui désigne désormais l’œuvre, c’est la relation. La relation avec l’espace et le visiteur. Et surtout que cette rencontre de l’espace et du visiteur se fait par le déplacement“.

La preuve par le miroir, matériau éminemment séduisant mais en l’occurrence détourné de sa seule jouissance esthétique. Robert Morris, qui a eu sa période du genre, l’utilise en cube, forme géométrique élémentaire, ou comme un objet du quotidien, tout aussi élémentaire, mais en y introduisant la fantaisie d’un Marcel Duchamp, sa philosophie aussi.

Partant de là, voici trois actes „miroitants“.

Miroirs et cubes

Dans le grand hall du Mudam, d’abord. Avec un premier environnement architectural spectaculaire, „Untitled (Portland Mirrors)“ (1977), où sur un faisceau de grosses poutres en bois balisant un périmètre à l’allure de ring, Morris dispose quatre grands miroirs permettant aux spectateurs qui déambulent de se voir dédoublés, déformés, de dos, de face. Multiplication il y a, et fragmentation, du corps, certes, mais aussi de l’espace. Espace tout à la fois physique, phénoménologique – c’est-à-dire: fruit d’une expérience vécue – et imaginaire.  Le temps n’est pas en reste, qui, du coup,  s’en trouve stratifié, feuilleté.

Au premier étage, ensuite. Avec, entre autres œuvres mythiques, les „Mirrored Cubes“, dont les surfaces réfléchissantes induisant l’illusion, ébranlent particulièrement notre perception.

Et ce n’est pas tout – tout n’est pas encore dit du processus illusoire. Dès lors que l’on s’en éloigne, la face supérieure du „Cube“ s’opacifie, „on a ainsi une idée d’absorption“, tandis qu’avec „Portland Mirrors“ dans le grand hall, „on garde une idée d’infini“.

Antiforme

Ce trouble, ou cette ambiguïté, s’expérimente enfin, ou derechef, dans le film „Mirror“ (1969), où l’on voit Robert Morris reculer dans un paysage de neige, tenant entre ses mains, à bout de bras, un miroir … où le paysage est reflété. Sauf que plus l’artiste recule, plus le miroir change de qualité/propriété en devenant une sorte de surface de projection; à la fin, le dispositif tend à ressembler à un solide blanc … qui disparaît dans la neige.

Pour autant, la neige est accessoire, comme d’ailleurs toute notion de nature ou de paysage. Pour Morris, expérimentateur du déplacement ou, plus précisément, du corps en mouvement dans un environnement, ce qui compte, c’est l’horizontalité. Cette dimension est spécifiquement à l’œuvre dans „Wall Hanging (Tenture)“, emblématique de l’époque feutre de l’artiste: „Tous les morceaux de feutre utilisés, même verticaux, s’affaissent et tous doivent toucher le sol.“

Vérification au premier étage du Mudam, avec un corpus de sculptures en feutre industriel, dont le processus de découpe et de suspension du matériau lacéré d’entailles horizontales, génère des géométries diverses, „imitant souvent la feuille“. En fait, si Morris aime tellement ce matériau souple, c’est parce qu’il est soumis … à la seule action de la pesanteur: c’est elle qui détermine la forme finale de l’œuvre. L’artiste s’efface, il laisse la libre expression à la matière qu’il nomme „antiforme“.

Le coup du hasard

On continue la visite. Au premier étage toujours. Faisant suite à des grands formats sculpturaux monolithiques, „délibérément dénués de la notion de composition“, faisant suite aussi à un groupe de trois formes en contreplaqué peintes en gris, trois œuvres neutres, ni abstraites ni figuratives, mais toutes les trois répétées à l’identique, en L, et toutes les trois permutables, faisant donc suite à tous ces ensembles, il y a enfin „Untitled (Scatter Piece)“, 1968-69/2009: une vaste installation „sans état idéal ni original“ – même pas une tentative de „paysage“ improbable – constituée de 200 éléments „composés pour moitié de six différents métaux et, pour l’autre, de feutre industriel“.

Ce qu’il faut savoir, c’est que cette œuvre a été détruite puis réactivée en 2010 avec des matériaux autres que ceux de la version originelle, mais tous également numérotés. Et tous également disposés/dispersés dans l’espace „comme par hasard“. Un hasard cependant relatif, puisqu’il est par exemple indiqué que „les pièces métalliques doivent être verticales et les feutres horizontaux“. En tout cas, ce principe de „la règle jamais vraiment prescrite“, typique de Morris,  peut à l’occasion être perverti. Et c’est le cas aujourd’hui, au Mudam, où les enfants conviés à installer/arranger les 200 éléments, l’ont fait en fonction des contraintes muséales. Du coup, l’aléatoire qui devait prévaloir s’est muséifié. N’en demeure pas moins qu’une circulation reste possible, à la faveur d’un passage aménagé le long des murs. L’œuvre parle à l’évidence au corps, à l’espace, mais le chaos rêvé n’a pas (eu) lieu.

Conçue non pas comme une rétrospective mais comme une constellation de différents espaces mettant en valeur les différents aspects du travail de Morris – réunissant tout de même ses œuvres majeures des années 60 et 70, provenant de collections publiques et privées –, l’exposition révèle la singularité d’une pratique que l’artiste qualifie lui-même de „série d’enquêtes“. Il suffit de se prendre au jeu – c’est une condition nécessaire – pour en apprécier toute la charge émotionnelle.

Infos

Robert Morris, „The Perceiving Body“, jusqu’au 26 avril. Tél.: 45 37 851.
L’exposition est organisée en collaboration avec le Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Etienne Métropole, où elle sera présentée du 6 juin au 27 septembre 2020.

Jacques Zeyen
22. Februar 2020 - 10.06

Wenn es so bei mir vor der Tür aussehen würde hätte ich ein Verfahren von der Gemeindeverwaltung am Hals wegen Umweltverschmutzung. Aber jetzt hätte ich eine Entschuldigung und würde es "art minimal" nennen.

Armand Gestaal
14. Februar 2020 - 20.19

Art minimal? Ist das nicht immer der Fall? Ich bin fast immer ganz allein wenn ich da bin.