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Rêve et valeurs

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Comme si le rêve européen était devenu honteux.

Baisser les impôts des investisseurs, réformer „les systèmes de protection sociale, démanteler les rigidités sur les marchés du travail“, les propos émanent de la bouche d’un homme „d’avant“, un de ceux dont les actuels acteurs ignorent jusqu’au nom et véhiculent pourtant la rhétorique en cours sur les marchés financiers.

Cet homme, qualifié de „grand prêtre du deutschemark“, était Hans Tietmeyer, président de la Banque centrale allemande de 1993 à 1999, maître à penser d’innombrables hommes politiques jusqu’à aujourd’hui, tels les Kohl, Waigel, Merkel, Schäuble.

Le citer n’est pas un hasard. Car ce fut du temps du chancelier Kohl et de son ministre des Finances Theo Waigel que l’Allemagne s’est mise à changer et à vouloir imposer sa marque à l’Union européenne. L’époque du Traité de Maastricht et de ses trois piliers avec au centre l’Union économique et monétaire, laquelle dominera et conditionnera bientôt l’ensemble de la démarche européenne.

A deux mois du référendum britannique, un signal fort vient une fois encore des Pays-Bas où une majorité des citoyens réfutent l’accord de l’UE avec l’Ukraine. Un vote qui, peu importe les modalités, aura un impact sur le gouvernement minoritaire de La Haye et indique le sentiment des citoyens qui ont du mal à comprendre une UE qui sanctionne ce grand pays et partenaire unique qu’est la Russie, à la faveur d’une Ukraine poussée dans les bras occidentaux par Washington pour nuire à Moscou, la Russie et son sous-sol devant enfin tomber sous la tutelle américaine. Raison pour laquelle d’ailleurs, le volet „russe“ des „Panama Papers“ a été financé par les services états-uniens.

Bref, le feu rouge hollandais n’est pas innocent, alors que les Britanniques s’apprêtent à voter le 23 juin sur le „Britain Exit“, en d’autres termes le Brexit, c’est-à-dire la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

La campagne des pros et des antis fait rage, les premiers devançant clairement les seconds dont les arguments ne portent pas. Peut-être, comme l’explique un chroniqueur du Financial Times, parce que les avocats du „opting in“ mettent systématiquement au premier plan des avantages mercantiles et ne cessent d’alerter sur les possibles conséquences économiques d’un départ.

Les valeurs intrinsèques de feu la Communauté européenne sont passées par profits et pertes, comme si le rêve européen était devenu honteux. Il faut toujours aller au bout de ses rêves, disait Modigliani, grand artiste. L’Europe a oublié son rêve car elle a perdu le feu sacré qui vous fait avancer.

L’utopie – assez pragmatique pourtant – a cédé le pas aux directives, aux normes, aux règlementations; l’ouverture des esprits s’est transformée en nombrilisme; le bien-être des banques prime sur les besoins des emprunteurs.

L’inversion des valeurs a tué le désir d’Europe. D’où la question légitime de nombreux Britanniques: pourquoi ce „machin“ triste et contraignant? Un „machin“ aux ordres incapable pour l’instant à s’élever et à redonner de l’espoir aux quelque 510 millions d’Européens.